Edito de Jean-Paul Blatz

L’histoire est certainement riche de témoignages individuels de solidarité.

Cependant, du siècle précédent, nos contemporains ont surtout souvenir de déflagrations armées et de génocides pré médités. La violence serait-elle constitutive de la nature humaine au point d’être une fatalité qui diviserait les individus entre bourreaux irresponsables et victimes innocentes ?

Les hommes n’auraient-ils pas prise sur leur propre destin pour faire de leur existence un vivre-ensemble heureux ?

Depuis 1945, les institutions internationales mettent à la disposition des États des chartes et des déclarations permettant l’organisation de sociétés démocratiques. D’incontestables progrès dans le respect des droits humains ont été accomplis dans quantité de pays. Néanmoins, comme les religions qui s’affadissent au contact incessant de la rudesse des relations humaines, les régimes politiques sont victimes d’ambitions disruptives mettant en cause la démocratie représentative. Pourtant elle reste la forme légitime de nos institutions politiques. Dès lors, ne nous appartient-il pas de susciter de nouvelles formes de participation destinées à mieux associer le citoyen à l’élaboration de la décision politique ? Dans ce contexte, la pratique interconvictionnelle a toute sa place.

Depuis plusieurs années, les membres du groupe G3i (Groupe International, Interculturel et Interconvictionnel), qui entretient des liens étroits avec les Réseaux du Parvis, réfléchissent à l’impact des associations humanistes et des religions sur le développement du bien vivre ensemble et contribuent à la cohésion sociale d’une Europe multiculturelle. Ils promeuvent le concept d’interconvictionnalité appelant à faire de la diversité des convictions non un affrontement de «vérités» antagonistes mais une source d’enrichissement individuel et collectif, le fondement même de la démocratie. La pratique de débats permet d’exposer et d’argumenter des convictions différentes, dans un respect mutuel.

Les débats n’ont pas pour objectif de parvenir à un consensus, mais, simplement, de mieux prendre conscience de la complexité des questions évoquées. Essayer de comprendre les convictions d’autrui, c’est aussi refuser de les dévaloriser ou de minimiser leurs différences avec les nôtres. Le dialogue permet également de prendre une distance critique vis-à-vis de soi- même, ou de moduler son propre agir en fonction des souhaits des autres.

Les relations interconvictionnelles ont nécessairement des limites. Considérant que le dialogue est dangereux car il les affaiblirait, certaines personnes le rejettent obstinément. D’autres, inconsciemment, n’en veulent pas sans désirer en connaître les raisons. Des comportements négatifs ne doivent nous détourner ni de l’anthropologie révélée par les sciences humaines, ni de la quête d’une résilience indispensable pour une coexistence pacifiée, quelles que soient la religion ou la philosophie des uns et des autres.

Jean-Paul Blatz