Différents textes des dernières revues

Écrit par Les Réseaux du Parvis
Vendredi, 21 Novembre 2008 15:11
Etranger Soi-même.
” L’étranger qui réside avec vous sera pour vous comme un compatriote et tu l’aimeras comme toi-même car vous vous avez été étrangers au pays d’Egypte. ”
J’ai choisi ce texte du Lévitique parce qu’il intègre et intercale l’amour du prochain, entre l’exhortation à l’hospitalité et le souvenir d’avoir été étranger.
Voici la pointe : le souvenir justifie l’hospitalité ; le ” car ” et en outre le
” comme “, comme un compatriote, comme toi-même, lient l’hospitalité au commandement d’amour.
Ma question, mon problème n’est pas du tout un problème d’exégèse mais de savoir ce que signifie pour nous aujourd’hui ” faire mémoire d’avoir été
Etranger ».
Ce n’est pas nécessairement, ni même essentiellement faire mémoire d’événements réels. Il s’agit d’une mémoire symbolique par laquelle nous intériorisons la condition effective d’étranger, d’où le titre que j’ai proposé :” Etranger soi-même “.
En mettant au centre le terme ” étranger “, je voudrais protester contre la réduction trop rapide dans l’imaginaire public actuel de l’étranger à la notion d’immigré, lequel est une des figures, hélas la plus voyante, de l’étranger mais qui n’est qu’un visiteur contraint à louer sa force de travail parmi nous.
Et dans l’imaginaire public nous passons donc de l’étranger à l’immigré puis de l’immigré à l’immigré clandestin au marginal. Et, soit dit en passant, c’est le méfait majeur d’une loi spécifique contre l’immigration clandestin de consolider ce glissement, cette réduction donc de l’étranger à l’immigré, de l’immigré au clandestin, du clandestin au marginal. (…)
Pour nous que j’ai appelé les nationaux installés, l’étranger c’est tout simplement un autre, peu et simple, je lis d’ailleurs la définition d’ ” étranger ” dans le Robert : ” qui est d’une autre nation et, parlant d’un individu : faisant partie d’une autre nation “.
Disons donc simplement : l’étranger c’est celui qui n’est pas de chez nous, qui n’est pas l’un des nôtres. Mais rien n’est dit sur ce qu’est l’étranger pour lui-même, chez lui-même et c’est une farce de dire : ” j’aime les étrangers chez eux “, car justement on ne sait rien dans la définition même du national, nous avons donc là ce qui est important pour les juristes et aussi dans la réflexion générale, cette opposition binaire, nous et eux.
C’est une opposition binaire qui côtoie dangereusement l’autre division binaire : le même et l’autre, l’ami, l’ennemi et pour les politologues c’est une structure fondamentale. C’est ce côtoiement de l’opposition ami-ennemi par l’opposition nous-eux qui est le péril spirituel du problème. Sur quelle certitude se construit et se maintient, persévère cette opposition binaire : national-étranger, nous-eux ?

Si nous ne savons pas qui nous sommes nous croyons savoir à quoi nous appartenons, de quelle communauté nous sommes membres. Cette notion d’appartenance, d’être membre de, est marquée par le titre de nationaux et porte des noms propres, le plus souvent de pays, la France, l’Angleterre, l’Allemagne etc…
Et donc à cet égard, par contraste, l’étranger c’est celui qui n’appartient pas notre cercle d’identité, d’appartenance. Je parlerai donc d’identité, d’appartenance puisque c’est cela qui va bouger, en quelque sorte qui va être comme sapé, miné par en-dessous par la réflexion qui suit et précisément par le souvenir symbolique d’avoir été étranger.
Or cette certitude, cette conscience et cette confiance d’appartenir à un corps politique déterminé est garantie, protégée et sanctionnée par un principe juridique fondamental, le principe de souveraineté qui articule le droit interne sur le droit international et qui signifie qu’il appartient souverainement à un Etat de délimiter son territoire et les règles d’appartenance à la Communauté et donc d’instituer l’opposition binaire national-étranger.
Cela veut dire négatif que vous ne pouvez pas choisir par exemple de devenir britannique si vous en avez envie. 

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La réforme de la santé :

L’actuelle réforme des institutions de santé participe à la destruction programmée du secteur public en en transférant une grande part au secteur privé. Les arguments financiers (coût du service public, déséquilibre des comptes de la protection sociale) sont pudiquement recouverts de considérations “humaines” (soins de qualité, plus accessibles et mieux répartis…).

C’est en fait tout le système de santé construit sur la solidarité et la répartition, en 1945, dans le cadre du programme du CNR qui est cassé. Le néolibéralisme triomphant ne pouvait guère accepter plus longtemps que les salaires différés que sont les cotisations sociales des salariés et de leurs employeurs échappent aux marchés financiers et à la spéculation, à l’image des fonds de pension pour ce qui concerne les retraites.
Certes, le constat de la situation sanitaire est plutôt alarmant. La liberté d’installation des médecins laisse des zones géographiques découvertes ; à l’hôpital, les urgences sont surchargées ; les malades sont refusés faute de lits disponibles pour les accueillir ; l’utilisation des plateaux techniques n’est pas optimale.

Certes aussi, le déficit de la sécurité sociale perdure. Une part croissante des profits des entreprises échappe à son financement car non assis sur la masse salariale. Le chômage ampute ses recettes ainsi que la dette sociale de l’Etat, les niches fiscales, les stocks options – qui ne contribuent pas – etc.
Cependant, les difficultés financières de l’hôpital ne sont dues d’abord à ce déficit, mais à des choix politiques, puisque les crédits d’investissement versés aux établissements du secteur privé sont sensiblement majorés par rapport à leur quantité de malades hospitalisés (un tiers).
Les directives européennes sur l’ouverture du marché des services qui tend à privatiser le système de santé encouragent ces choix.

Et tout cela pèse de plus en plus sur les assurés sociaux, usagers du système de santé qui doivent supporter de plus en plus de franchises, de déremboursements, de forfaits journaliers, de dépassements d’honoraires, d’augmentation des cotisations à leurs mutuelles complémentaires etc. Les ménages voient leur budget santé augmenter d’année en année ou sont contraints de renoncer à certains soins.

Le dernier argument avancé remet en cause la gestion des établissements hospitaliers qui ne relèvera plus d’abord ni des professionnels de la santé, ni des élus des collectivités territoriales, ni de l’assurance-maladie, mais d’une autorité administrative : les Agences Régionales de Santé, qui organiseront l’offre de soins en y mêlant les moyens du service public et ceux du secteur privé. Derrière cette mutualisation des moyens se profile une partition déjà largement en oeuvre des activités hospitalières : au privé, les actes techniques et opératoires tarifés, et rentables, les courts séjours lucratifs ; au public les convalescents, les socialement précaires, les longs séjours gériatriques, les urgences médico-sociales, et bien sûr la formation et la recherche.
L’hôpital public devra équilibrer son budget à grand-peine tandis que les établissements privés pourront faire fructifier leurs parts de marché selon les choix de leurs actionnaires, mais avec les cotisations des assurés sociaux.
Ainsi en est-il de la Générale de Santé et ses 175 cliniques, de la Compagnie Générale de Santé et ses fonds de pension américains gourmands en gros dividendes.

Marché et concurrence sont en effet devenus les maîtres mots de toute l’économie. La marchandisation de la santé participe logiquement à cette dynamique. L’équilibre budgétaire n’est plus suffisant. Il convient de générer des profits. Avec la facturation à l’activité (qui remplace le prix de journée dans le cadre de la dotation globale), ce n’est plus le malade qui est pris en charge mais sa maladie qui est commercialisée, en fonction des cours du marché.
Les honoraires ne seront bientôt plus dépassés mais complètement libérés.
La concurrence achèvera ce qui reste de la solidarité…

Oui, il fallait une réforme. Mais son objectif majeur devait être l’humanisation du système de santé. Il y avait déjà beaucoup à faire dans ce sens. Une telle perspective se trouve fragilisée et s’éloigne encore davantage avec cette réforme plutôt régressive.
Michel Deheunynck

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Eglise qu’as-tu fait de ton Evangile ?

UNE TENTATIVE DE SYNTHESE

Interrompons un moment la succession de ces textes et tentons d’en faire un début de relecture. Les cris qui se sont élevés dans la première partie ne sont pas les cris d’une simple indisposition ou d’une désagréable irritation.

Cris.
Ce sont des cris qui surgissent de l’Evangile, source et socle de notre foi, de son message de paix, d’amour, d’ouverture, qui appelle notre raison critique et notre envie d’agir.
Ce sont des cris de douleur qui relaient les cris des pauvres, des souffrants, d’une humanité blessée et de ceux qui s’efforcent de participer à l’avènement d’un monde plus solidaire et plus juste.
Ce sont les cris d’humanistes, croyants ou non, pétris d’une foi dans l’homme, militant pour sa dignité, animés par une attitude et une volonté d’espérance, qui mettent l’humain, même fragile, avant la sainteté, la recherche avant la vérité, la tendresse avant la rigueur morale.
Ce sont les cris de croyants ouverts et loyaux qui sont déstabilisés et remis en cause dans leur attachement à l’Eglise, compromis avec elle et malgré eux par leur entourage, interpellés par ceux qui s’en éloignent ou qui la quittent.
Ce sont les cris de celles et ceux qui s’efforcent à grand peine et souvent en vain de donner une image de l’Eglise autre que celle des bénitiers et du latin, des dentelles et du pourpre, par-delà la honte, l’humiliation, l’écoeurement, le discrédit.
Ce sont les cris de celles et ceux qui se désolent de tant d’hypocrisie et de mépris ; de condamnations et de réduction au silence des chercheurs, des pasteurs, des prophètes ; d’une Eglise tournée vers le passée, indifférente aux mutations de notre époque.
Ce sont des cris qui dénoncent le danger des intégrismes dans un monde pluriel, les dérives sectaires de l’Eglise et le risque de schisme face à des références revendiquées comme absolues qui font plutôt peur aujourd’hui : la norme, la pureté, la vérité, l’ordre… !.
Mais tous ces cris ne sont pas que des cris. Ils portent plus loin qu’eux des appels et des attentes auxquels ils entendent être contributifs. La deuxième partie de notre recueil relève nombre de dysfonctionnements institutionnels, mais ouvre aussi des pistes de remédiation.

S’agit-il de mépris ?
Le déficit de communication d’une Eglise centralisée, de moins en moins collégiale, y est évidemment fortement dénoncé. Le manque de débat est souligné à la fois avec le monde contemporain, le fossé se creusant par manque de dialogue et de partage; et avec les chrétiens eux-mêmes dont beaucoup se sentent rejetés, abandonnés, ignorés…
D’où un appel à une opinion publique dans l’Eglise pour que le peuple de Dieu répercute et approfondisse ses requêtes légitimes.
Mais ce défaut de communication  n’apparaît pas seulement comme un problème de fonctionnement mais, plus grave, comme un problème de communion.
Il y a d’abord une erreur de positionnement : une parole qui vient d’en haut n’est plus crédible. Elle n’est signifiante et opérante que dans l’échange et la réciprocité.
L’Esprit-Saint devance l’Eglise au coeur de l’humanité, qui a donc autant de message divin à lui apporter qu’à en recevoir d’elle.
Il convient pour cela de s’écouter et de se parler à hauteur de visage d’homme.
Est mise en cause aussi la tonalité du discours, sa suffisance doctrinaire, son jugement dépréciatif sur le monde qu’il ne parvient pas à aimer ; ses menaces et condamnations multiples etc… Dans le rituel de base de la messe du dimanche, on peut ainsi dénombrer 17 fois le terme de “pécheur”, “péché”, mais quatre fois seulement celui d’ “amour”, “aimer”.
Il est vrai que pour mieux le soumettre et l’asservir sournoisement, il est stratégique de mettre le peuple en défaut, tout en lui précisant que c’est pour son bien.

Un monde nouveau.
Il y a ensuite une difficulté, voire un sérieux blocage à lever pour que l’Eglise prenne en compte enfin les évolutions scientifiques (compréhension de la vie) et culturelles (place des femmes) de notre époque qui génèrent de nouvelles représentations de la vie humaine et en renouvellent le sens.
De même est dénoncée la réticence profonde de l’Eglise hiérarchique à reconnaître les chemins nouveaux ouverts par la sécularisation. Il lui faudrait se réapproprier l’intuition de l’Evangile qui a conduit Jésus de Nazareth à bonne distance des dispositifs religieux pour nous révéler que là se joue le salut de l’humanité, un salut non plus réservé à un petit troupeau d’élites méritantes à tendance sectaire, mais à tous.

Une question de langage.
Serait nécessairement à revoir le langage ecclésial, ésotérique pour nombre de nos contemporains, inadapté à la transmission d’un message de fraternité et d’amour ; une liturgie formaliste, non expressive de la foi vécue ; des rites fétichistes, non évolutifs et non créatifs, une sacramentalisation surinvestie qui écrase, étouffe le message évangélique au lieu d’en être le discret mais efficace vecteur.

Préoccupations dérisoires.
Et il y aurait surtout à renverser les priorités au coeur des enjeux d’aujourd’hui.
Dans l’Evangile, il n’est quasiment pas question de la vie sexuelle qui est pourtant obsessionnelle pour la hiérarchie ecclésiale. Alors que le service de l’argent, incompatible avec celui de Dieu, ainsi que les rapports sociaux y ont une large place dans les paraboles et autres récits. De quoi répondre à bien des défis posés par les réalités socio-économiques et écologiques qui en découlent, du monde d’aujourd’hui. De quoi contribuer à la lutte contre les privilèges et les profits, à la solidarité et à la justice sociale au nom de l’Evangile.
En regard de ces priorités, combien les questions de rites traditionnels et de repères identitaires peuvent sembler plus que dérisoires !.

Quelles solidarités ?.
Les événements vécus et douloureusement ressentis apparaissent ainsi dans la logique du fonctionnement ecclésial qui ne voit plus l’être humain, qui lui parle sans l’écouter, s’éloignant des plus fragilisés, des plus précaires, qui devraient être ses meilleurs complices pour un monde plus juste mais qui sont pas, il est vrai, ses meilleurs financeurs ; s’éloignant aussi des intellectuels qui devraient être ses meilleurs alliés à la recherche de nouveaux sens à la vie, mais qui ne sont pas, il est vrai, les moindres de ses contradicteurs.
Les derniers ont vocation à être les premiers, nous dit l’Evangile. C’est aux délaissés de la société d’humaniser le monde ; c’est aux délaissés de l’Eglise de l’évangéliser.
C’est le sens de tous ces mouvements de résistance spirituelle qui se lèvent aujourd’hui, entraînant même jusqu’à certains évêques qui ont osé sortir de leur réserve, tous ces mouvements qui s’efforcent de relever celles et ceux que Jésus tient encore et toujours à mettre debout tandis que le système religieux qui prétend le servir s’obstine à la les maintenir à genoux. Mais, disait Giraudoux, ” Servir est la devise de ceux qui aiment commander “.
Mais pour appuyer et cibler ces mouvements de résistance active, il convenait d’approfondir les racines des dysfonctionnements institutionnels incriminés. C’est ce qu’ont cherché à faire les documents que nous vous proposerons plus loin, dans la troisième partie.
L’Evangile, et donc le christianisme tel qu’il devait être issu, est radicalement subversif, révolutionnaire, hostile aux pouvoirs, au règne de l’argent, à la violence instituée, à la morale des bien-pensants etc… Mais ce sont toujours ces bien-pensants, et seulement eux, que la hiérarchie catholique a craint de contrarier, de scandaliser. Pour les épargner, au risque de trahir sa vocation, elle est devenue dogmatique et ritualiste, plaidant une morale infantilisante et culpabilisatrice, légitimation de tous les conservatismes.
Cela a pu aller jusqu’à une compromission, une collusion des autorités catholiques avec les tenants de l’ordre, le fascisme et les dictatures, entraînant souvent les simples fidèles à s’en accommoder eux aussi… et à se trouver en conflit de conscience, telle la société latino-américaine, très attachée à la religion et marquée par la brutalité des injustices, des inégalités sociales, de la violence établie, victime d’un pouvoir politique cruel et corrompu, mais catholique, donc soutenu et protégé par l’Eglise romaine.
L’attitude et les sentences du pouvoir ecclésial se trouvent ainsi en contradiction et avec la morale commune et avec le message évangélique.

Inadaptation.
D’autres analyses convergentes mettent en cause la sacralisation de la hiérarchie, instituée comme une société d’ordre. Se plaçant elle-même au centre de son message, c’est son propre intérêt qui devient une fin en soi. Ceci au prix d’un juridisme pointilleux, absurde et déshumanisant et au risque d’un schisme avec les croyants attachés aux valeurs évangéliques et à la quête de sens. Ce positionnement suppose l’élimination de toute émergence de contre-pouvoir, vécue dans la sensation paranoïde d’être toujours victime de complots de la part de tous ceux qui ne lui sont pas inféodés.
Cette posture ecclésiale, hautaine et malsaine, est d’autant plus préjudiciable aujourd’hui qu’on ne peut plus évangéliser à partir d’une position de pouvoir mais seulement à travers les relations humaines à parité. Les actions prophétiques vécues avec nos contemporains sont bien signifiantes que les belles déclarations tombées d’en haut. Une parole théologique non incarnée est pervertie ; documents, proclamations, discours, perdent toute pertinence.
En passant d’une Eglise difficile de lutte pour promouvoir la justice et la solidarité à une Eglise facile de rites, de dévotion et de caritatif, l’institution catholique est ainsi devenue un obstacle plus qu’une aide à l’évangélisation des coeurs et des esprits, à l’annonce du Royaume de Dieu dont elle n’est ni le centre ni le propriétaire.

Les intégristes.
En regard de ces enjeux, les arguments développés par les intégristes et leurs mouvances, que nous avons choisi de vous présenter aussi, sont ô combien dérisoires et disqualifiants. Leur stratégie tient pourtant du blocage et n’ouvre aucune perspective d’ouverture. Ils se referment sur leurs propres repères identitaires, se référant à une tradition figée dans le temps et fermée au monde à laquelle ils entendent bien soumettre toute l’Eglise. Pour cela, ils ne sont prêts à aucune forme de dialogue, et encore moins de concession, sûrs qu’ils sont de leur vérité, avec l’appui idéologique et financier de leurs complices extrémistes, promoteurs et artisans d’une société d’ordre, profondément inégalitaire, certes peu inspirée par l’Evangile.
Mais c’est devant eux qu’à Rome se déploie le tapis rouge et se multiplient les courbettes de bienvenue. Tandis qu’aucun signe bienveillant n’apparait en direction des catholiques d’ouverture…. Alors, le peuple chrétien réagit.
Ce ne sont plus les conservateurs qu’on a peur de choquer.

S’affranchir.
Ce déblocage salutaire trouve sa source et son cadre dans la dynamique d’affranchissement du monde d’aujourd’hui :
– les institutions sont volontiers la cible de jugements critiques ; l’institution catholique ne peut prétendre y échapper ;
– les droits de l’homme, et de la femme, rendent libre de décider et de se responsabiliser individuellement dans son rapport aux autres. Cela rejoint la dynamique émancipatoire de l’Evangile et la primauté de la conscience comme référence comportementale ;
– pour répondre aux défis de la modernité, la théologie d’aujourd’hui doit faire clairement la part entre ce qui relève de l’esprit et du message de l’Evangile et ce qui relève de l’histoire de l’institution ;
– les réseaux de communautés chrétiennes doivent être convaincus, engagés, matures ; s’organiser en communautés de base, avant tout communautés de pauvres ; garder mémoire, mais aussi résister et cheminer.
Finalement, cette “tornade ” est plus qu’une turbulence et peut être positivée. Elle permet au peuple de Dieu de dire ce qui ne va pas et pourquoi et de se réapproprier le message de la Bonne Nouvelle.

Aller plus loin que Vatican II
et devenir humain.
C’était l’intuition du Concile Vatican II qui suscite à nouveau de l’intérêt alors que les nouvelles générations n’en avaient pas pris le relais et que les plus anciens ne l’évoquaient, au mieux, qu’avec nostalgie. Ce concile qui appelait, dans son esprit, à ne pas en rester là où il avait abouti mais à aller bien au delà de lui, toujours plus en avant.
Les motivations sont résumées dans une des déclarations autour :
– du lien entre les différentes religions et convictions humanistes dans un climat d’écoute mutuelle, un esprit de dialogue ;
– du souci de promouvoir l’annonce de la Bonne Nouvelle de l’Evangile ;
– d’une Eglise où on a sa place quelle que soit sa façon de vivre, de croire ou d’aimer ;
– et ouverte, accueillante, solidaire des plus pauvres, luttant avec eux pour la justice et la fraternité ;
– de la liberté d’exprimer ses convictions, de partager ses recherches tâtonnantes de Dieu et du sens de la vie.
La référence au Concile Vatican II est souvent évoquée mais aussi la nécessité d’analyser la posture théologique et ecclésiologique des intégristes et mesurer leur danger humain, spirituel et politique.
Au-delà, il s’agit aussi d’oeuvrer pour le développement humain par la recherche d’une organisation sociale fondée sur le service de tous, le souci de la terre, la créativité et la croissance spirituelle, travailler à l’humanisation de l’humanité et de nos Eglises, s’inscrire dans la société d’aujourd’hui et de demain pour y discerner les signes d’une humanité qui grandit et en valoriser les fruits.
Quant aux modalités d’actions, elles vont du développement de réseaux de communautés résistants à un système de pensée figée, à une proposition de temps synodal sur l’avenir de l’Eglise ou même un concile continental laïc, en passant par des interpellations d’évêques (dont certains se sont rapprochés des positions de nos groupes, comme à Nancy), en passant par des propositions de textes mis en débat ; de week-ends de réflexion ; de multiples pétitions de théologiens germanophones (pro-Vatican II), espagnols (pour la liberté évangélique), du mouvement international IMWAC (pour l’ouverture au souffle de l’Esprit-Saint qui appelle à ne pas résigner mais à agir), divers rassemblements, tel celui de Grenoble où plusieurs centaines de personnes ont exprimé leur malaise et leur indignation dans l’Eglise catholique, en présence de l’évêque ; une marche multicentrique de catholiques citoyennes et citoyens organisée en réaction à une intervention particulièrement méprisante et machiste d’un archevêque cardinal.
Signalons aussi la mobilisation de protestants s’estimant concernés par un discrédit qui affecte non seulement le catholicisme mais le christianisme dans son ensemble.
Et sur nos Réseaux du Parvis, on peut constater que tous ces mouvements de réactions peuvent rapprocher encore un peu plus les militants dans leur diversité : ceux qui situent leurs réactions dans le cadre de l’institution affermissent et élargissent leurs options et ceux qui se défendent d’être ” ecclésio-centrés ” mais se sentent atteints dans leurs combats en société.
Les uns et les autres se mobilisent ensemble pour organiser une rencontre nationale du peuple de Dieu adulte et libre et de ses partenaires en novembre 2010 à Lyon, dans la perspective d’un rassemblement international pour le cinquantenaire du Concile Vatican II en 2015.
Un immense malaise accumulé depuis des années a ainsi fini par ouvrir des voies d’expression, de riposte et d’édification. Restera aux générations plus jeunes à prendre, à leur façon; le relais de l’histoire, à conquérir à leur tour leurs espaces de liberté pour inventer d’autres nouveaux chemins  où ils pourront eux aussi grandir dans leur humanité et dans leur foi.

Michel Deheunynck.
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UNE COURTE HISTOIRE DU NEOLIBERALISME.

En 1945 ou 1950, si vous aviez sérieusement proposé l’une des idées ou l’une des politiques du kit standard néolibéral actuel, on vous aurait renvoyé en se moquant de vous ou on vous aurait envoyé à l’asile. A l’époque, dans les pays occidentaux en tout cas, tout le monde était soit keynésien, soit social-démocrate, soit social démocrate-chrétien ou encore marxiste d’une tendance quelconque.

Bien que cela puisse sembler incroyable aujourd’hui, particulièrement aux membres les plus jeunes du public, le FMI et la Banque Mondiale étaient considérés comme des institutions progressistes.

On les appelait parfois les jumeaux de keynes parce qu’ils étaient sortis du cerveau de keynes et de Harry Dexter White, l’un des conseillers les plus proches de Franklin Roosevelt. Quand on a créé ces institutions à Bretton Woods en 1944, leur mandat était d’aider à empêcher des conflits futurs, en prêtant de l’argent pour la reconstruction et le développement et en réglant les problèmes temporaires de balance de paiements.

Elles n’avaient aucun contrôle sur les décisions économiques des gouvernements individuels et leur mandat n’incluait pas le droit d’intervenir dans la politique nationale.
Dans les pays occidentaux, l’Etat Providence et le New Deal avaient fait leur apparition dans les années 30, mais leur développement fut interrompu par la guerre. La première priorité du monde des affaires au moment de l’après-guerre fut de les remettre en place. L’autre chose importante à faire était de redynamiser le commerce mondial – ce fut accompli grâce au Plan Marshall qui faisait une fois de l’Europe le partenaire commercial essentiel des Etats-Unis, la plus puissante économie du monde. Et c’est à ce moment-là que les vents forts de la décolonisation se mirent également à souffler, que la liberté soit obtenue par un accord comme en Inde ou par la lutte armée comme au Kenya, au Vietnam et dans d’autres pays.

Globalement, le monde s’était engagé sur une voie extrêmement progressiste. Le grand savant Karl Polanyi publia son oeuvre majeure, La grande transformation, en 1944, une critique féroce de la société industrielle du XIXe siècle, basée sur le marché. Il y a plus de cinquante ans, Polanyi fit cette déclaration incroyablement prophétique et moderne : ” Permettre au mécanisme du marché d’être l’unique directeur du sort des êtres humains et de leur environnement naturel … aurait pour résultat la démolition de la société. ” p.73 de l’édition anglaise. Cependant, Polanyi était convaincu qu’une telle démolition ne pourrait plus se produire dans le monde de l’après-guerre car, comme il le dit p.251, ” Au sein des nations, nous sommes témoins d’un développement tel que le système économique cesse de dicter sa loi à la société et que la primauté de la société sur ce système est assurée “.   

Hélas, l’optimisme de Polanyi n’était pas de mise – l’idée même du néolibéralisme est qu’on devrait autoriser le mécanisme du marché à diriger le destin des êtres humains. L’économie devrait dicter ses règles à la société, et pas le contraire. Et comme l’avait prévu Polanyi, cette doctrine nous mène tout droit à la ” démolition de la société “.
Qu’est-il donc arrivé ? Pourquoi en sommes-nous arrivés là un demi-siècle après la fin de la Seconde Guerre mondiale ?
Comment le néolibéralisme a-t-il un jour pu sortir de son ghetto ultra-minoritaire pour devenir la doctrine dominante du monde d’aujourd’hui ?
Pourquoi le FMI et la Banque Mondiale peuvent-ils intervenir à volonté et forcer les pays à participer à l’économie mondiale sur des bases défavorables ?
Pourquoi l’Etat Providence est-il menacé dans tous les pays où il avait été établi ? Pourquoi frôle-t-on la catastrophe en ce qui concerne l’environnement, et pourquoi y a-t-il tant de pauvres aussi bien dans les pays riches que dans les pays pauvres, alors qu’il n’y a jamais eu de richesses qu’aujourd’hui ?

Ce sont ces questions auxquelles il faut répondre d’un point de vue historique.
Commençant par un petit groupe embryonnaire à l’Université de Chicago, avec pour noyau l’économiste philosophe Friedrich von Hayek et ses étudiants comme Milton Friedman, les néolibéraux et leurs fondateurs ont créé un réseau international énorme de fondations, instituts, centres de recherche, publications, chercheurs, écrivains et experts en relations publiques pour développer, bien présenter et attirer sans arrêt l’attention sur leurs idées et leur doctrine.

Ils ont construit ce cadre idéologique extrêmement efficace car ils ont compris de quoi l’intellectuel marxiste italien Antonio Gramsci parlait lorsqu’il développait le concept d’hégémonie culturelle. Si vous pouvez occuper la tête des gens, leur coeur et leurs mains suivront. Le travail idéologique et promotionnel de la droite a été absolument remarquable. Ils ont dépensé des centaines de millions de dollars, mais le résultat en valait la chandelle, car ils ont fait apparaître le néolibéralisme comme la condition naturelle et normale de l’homme. Peu importent le nombre de désastres en tout genre que le système néolibéral a visiblement engendrés, peu importent les crises financières qu’il peut entraîner, peu importe combien de perdants et d’exclus il peut créer, tout est fait pour qu’il semble inévitable, comme une action divine, le seul ordre économique et social possible qui nous soit accessible.

Je voudrais insister sur l’importance de comprendre que cette vaste expérience néolibérale que nous sommes tous forcés de vivre a été par des gens à dessein. Une fois que vous avez saisi ceci, une fois que vous avez compris que le néolibéralisme n’est pas une force comme la gravité mais une construction totalement artificielle, vous pouvez aussi comprendre que ce que certains ont crée, d’autres peuvent le changer. Mais ils ne pourront pas le changer s’ils ne reconnaissent pas l’importance des idées.

                                                                                                                                                              SUSAN GEORGE

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Le “Café-Théo” au pays des Olonnes en Vendée :

Origine et diversité des thèmes abordés

En septembre 1999une idée d’Olivier Gaignet, prêtre responsable de la paroisse Sainte Marie des Olonnes, a été retenue par un groupe de l’association « Solidarité Église – Liberté 85 ».

Un thème: «Qui est Dieu ?» et un Café : « Le Petit Navire » sont choisis et le 30 novembre à 18 heures c’est la surprise de se retrouver à plus de soixante, catho ou non, avec les habitués de ce sympathique petit café de la Chaume.

Pendant plus de deux heures, avec quelques temps consacrés aux consommations et échanges individuels, Olivier Gaignet a permis à chacun de s’exprimer, de s’écouter et de découvrir que Dieu était rarement un inconnu, mais que chacun en avait une perception différente: Bonté, Perfection, Amour, Père, Vivant révélé par les textes bibliques. Les personnes de même sensibilité se retrouvent dans des courants de pensées ou des organisations religieuses: les chrétiens, catholiques ou protestants, pratiquants ou non, mais aussi agnostiques, libres penseurs, chercheurs de sens dans les religions orientales.

Pour répondre à la demande: «À quand le prochain Café Théo ? » il a été choisi un autre Café, plus grand et à l’autre extrémité des Sables d’Olonne, le thème est choisi en fonction de l’actualité mouvementée de ce début d’année 2000, la tempête et la marée noire : « La toute – puissance de Dieu et les forces de la nature ».

Nous étions bien 80 personnes dans la salle des billards à reconnaître la responsabilité de l’homme vis-à-vis de la nature confiée par Dieu qui lui en laisse toute la responsabilité. Cette nature qui est d’ailleurs de plus en plus connue et comprise grâce aux développements des techniques mais pas forcément respectée quand des intérêts variés et destructeurs sont prioritaires. Quant à la toute-puissance de Dieu, elle nous a été révélée comme celle de la toute-puissance de Son Amour pour l’ensemble de sa création. Un participant a évoqué l’image du jeune enfant endormi sans défense sur le sein de sa mère, aimé par ses parents prêts à tout pour lui.

Cette fois encore la demande du prochain Café -Théo nous a  poussés à inviter croyants et incroyants à se retrouver avant Pâques, le ler avril, au Café du Départ, en face de la gare pour parler de ” La vie après la mort » ; ce n’était pas un poisson d’avril !

C’est plus de 120 personnes qui sont venues pour parler de la mort, ce dernier départ et grand passage vers l’inconnu. Beaucoup ont évoqué une certaine continuité de la vie avec un être aimé qui continue à soutenir ou guider ; d’autres ont dit préparer, assumer leur propre mort ou en avoir peur et ne pas vouloir y penser ; certains ont parlé de leur façon d’accompagner des mourants et de la qualité que peuvent avoir les relations à ces moments ultimes. Il a aussi été question du désir de la mort comme délivrance d’une vie trop difficile et du suicide.

Après la richesse des échanges et la constatation qu’il avait  été parlé de la mort, sujet tabou, si triste, qui fait peur, et  très peu de la vie, aspiration vitale de chacun, il en découla le choix du sujet suivant : « La vie a – t – elle un sens ? »

Déjà 24 “Cafés – Théo” à la mi 2002

L’expérience s’est poursuivie les années suivantes. Fin juin 2002, il aura été réalisé 24  Café-Théo dans 19 cafés différents (dont  2 à Olonne , 3 au Château d’Olonne, les autres dans différents quartiers des Sables) . Le nombre de participants a varié de 55 à 160 par thème. Le même thème étant le plus souvent traité deux fois dans deux cafés différents, en variant jours et heures, pour répondre à la demande. 

Les thèmes suivants abordés ont été : « Vendée Globe, possibilités humaines et recherche de l’infini », « Religions et Liberté », «  Evangile et Bonheur », « La politique ? », « Les missions(1) » « Les missions aujourd’hui (2) », « De la violence à la paix », « Peut-on vivre sans Dieu ? », « Qui est Jésus ? », « Si j’étais président(e) :ma priorité ? », « Eglise catholique et droit d’asile ».

Il est à noter que ces rencontres répercutées par la presse, et les échanges  à la  mi-temps,  ont suscité d’autres demandes et d’autres réalisations.

Il y eu des « Choco-Théo » pour et par des jeunes qui en ont eu l’idée.

Les responsables du festival Siménon ont demandé des «  Café-Théo » avec un thème choisi par eux et en lien avec leur programme de l’année. Ce furent plutôt des « conférences débat » données dans un bar, par le curé de la paroisse, avec l’expression de personnalités locales compétentes.

Le thème de la violence à la paix  a été repris, sous forme de «  tables rondes débat » dans la salle de conférence du centre culturel. Elles ont permis d’écouter et  de mieux comprendre des personnes qui toutes aspirent à la paix, mais qui ont des visions différentes des évènements et de l’histoire. Deux tables rondes ont réuni un prêtre, une musulmane, un juif, une communiste.

Comment vient-on au “Café-Théo”?

Une jeune femme en parle sur son lieu de travail et vient avec sa collègue, l’année suivante elles s’inscrivent à la catéchèse adulte dont la moitié du groupe a participé aux Café-Théo.

Une personne en difficulté psychologique vient sur le conseil de son psychiatre.

Des tracts ont été vus dans des salles d’attente médicales.

Une personne non-croyante dit s’être sentie accueillie par les chrétiens des Café-Théo.

Plusieurs couples qui n’auraient pas fait de démarches vers l’Eglise, demandent au prêtre animateur de bien vouloir les marier.

Des participants donnent des idées pour améliorer la publicité (tracts, affiches).

Des élus et des habitants de plusieurs autres communes s’y retrouvent.

Les propriétaires des cafés nous réservent un bon accueil et nous remercient. Ils avouent « découvrir l’Eglise autrement » et nous invitent à revenir.

Pourquoi vient-on au Café-Théo ? 

Bérangère (22ans) répond à la question :

« La recette est pour le moins excellente et pas uniquement pour les patrons des bistrots….les nombreux articles de journaux parlent d’eux même !

Tout le monde s’y retrouve et chacun est accepté quelque soit son âge, ses convictions, sa couleur . Emballée par ces soirées, j’y ai emmené mes deux grand-mères successivement. L’une d’elle, veuve et très timide, s’est exprimée publiquement, à ma grande surprise…..

Le Café-Théo, c’est tout d’abord l’Eglise « hors les murs », l’Eglise tolérante envers les idées de chacun, l’Eglise qui n’est pas là pour convertir mais qui est à l’écoute d’autrui. Jésus aussi partait à la rencontre de la population pour discuter…

Le Café-Théo, c’est également l’occasion de réfléchir ensemble sur un thème un peu plus poussé que les banalités du quotidien( !), dans un lieu neutre, d’ordinaire consacré à la détente, au bon temps, à l’oisiveté, dans un lieu où personne n’est mal à l’aise.

Certes on vient de perturber les habitudes, mais en sortant, on s’aperçoit que certains ont redoré le blason de l’Eglise, que d’autres ont été interpellés par telle réflexion et ont revu leur jugement, etc. Bref la soirée reste dans l’esprit de chacun. »

L’équipe d’animation

L’équipe d’organisation est composée de deux prêtres, deux religieuses et cinq laïcs qui se retrouvent pour faire le bilan, réfléchir et préparer le prochain Café-Théo.

Cette équipe est consciente et heureuse de vivre, à travers cette démarche, sa vraie vocation chrétienne, en communauté. Chacun est amené à développer des capacités différentes et complémentaires pour la recherche et le choix des thèmes, des horaires, des lieux, pour les contacts avec les cafetiers, les tracts, la sono, la presse etc.…

Elle a pu découvrir ainsi que cette formule est un véritable laboratoire de prise de parole, de convivialité, d’échanges, d’écoute sans jugements.

Elle a également le sentiment d’une proximité avec Jésus et ceux qui l’accompagnaient, dont il est question dans les Evangiles. En effet les cafés d’aujourd’hui, ne sont peut être pas très éloignés, pour notre civilisation sédentaire, des chemins à travers champs et vignes, montagnes ou bords du lac, où Jésus prenait le temps de rencontrer ses contemporains. Il est attentif à ceux qui expriment leurs difficultés à vivre, les veuves, les malades. Jésus leur propose, guérison, réflexions ou réponses à partir de nombreuses paraboles.

N’est ce pas aussi une façon de faire tomber des murs construits au cours des siècles entre religion et laïcité, entre ceux qui croient au ciel et ceux qui n’y croient pas ?

Dans l’Evangile, Jésus parle aux étrangers, écoute ceux qui ont des problèmes et se posent des questions. Il n’est pas dit si ils fréquentent ou non la Synagogue. Il est seulement parfois précisé qu’il s’agit d’un mendiant, d’un scribe, d’une samaritaine, de parents…

La démarche de l’équipe qui organise et des prêtres qui animent est bien d’aller vers ceux qui seront là, pour partager une « bonne nouvelle » qu’ils ont cru percevoir. C’est aussi pour chercher à mieux comprendre le message évangélique et mieux en parler pour se faire entendre. Cela se réalise à partir de ce qui se dit, des réflexions et des expériences diverses. Avec, pour nous, la conviction que Jésus est toujours présent, attentif à chacun.

Contacts: Solidarité Eglise Liberté de Vendée (SEL). Cette association, créée en 1999, regroupe des hommes et des femmes, chrétiens ou non, qui recherchent un lieu de liberté, de parole, de réflexion, de témoignage et qui se veulent proches et solidaires de ceux que la société ou l’Eglise marginalise ou exclut.

Francine Trannoy, 25 rue Nationale, 85100 Les Sables d’Olonne. Tel. .




Audit citoyen de la dette

Écrit par Les Réseaux du Parvis
Vendredi, 16 Mars 2012 16:13

Un Appel pour un Audit citoyen de la dette

Appel du Groupe « Evangile et société » (GES) à signer la pétition
« Pour un audit citoyen de la dette publique »

La crise sert d’alibi et de moteur pour poursuivre une politique qui affecte en priorité les petits, les pauvres, ceux qui sont sous le seuil de pauvreté.
Ce sont ceux-là le cœur de notre combat : rendre leur dignité à tous ceux qui sont esclaves de la misère… 7 millions et demi de salariés qui perçoivent moins de 750 € par mois, ce qui touche près de 30 millions de personnes. Inadmissible aussi bien pour le citoyen que pour le disciple déclaré du fils de l’homme, Jésus de Nazareth. Tous les dimanches de l’Avent parlaient de justice pour les cassés de la vie. La bonne nouvelle est pour eux, en priorité. Et nous, nous sommes invités – c’est notre mission d’êtres humains – à mettre tous nos moyens, toute notre énergie à libérer nos frères de l’esclavage dans lequel les régimes économiques, financiers et politiques les maintiennent, voire les enfoncent, avec notre complicité de fait.

Nous relisons Matthieu, en commençant par les toutes premières parole de Jésus au moment de son baptême par Jean au Jourdain : « Tout ce qui est juste doit être établi, faisons en sorte de l’accomplir ».
Et puis : « Allons avec courage sur les chemins de la justice à la rencontre du Seigneur ». Le Dieu auquel nous croyons « Vient à la rencontre de celui qui pratique (agit) la justice avec joie » ; « Ciel nouveau et terre nouvelle où résidera la justice » ; « Porter la bonne nouvelle aux pauvres, guérir les coeurs brisée, annoncer aux captifs la délivrance, la liberté aux captifs…. » ; « Il comble de biens les affamés et renvoie les riches les mains vides »
Ces paroles de l’Avent définissent clairement notre but, notre objectif, notre mission.

Au sein des Parvis, des groupes, des personnes ont déjà exprimé leur inquiétude et leur indignation devant la situation économique et sociale et le problème de la crise financière et de la dette des Etats européens (voir par exemple sur le site http://www.reseaux-parvis.fr/ la déclaration : « Crise… Dette… une autre Parole pour plus de justice » et le communiqué de presse du groupe ECCO : « Ils nous font payer la crise »).

Le GES veut être présent dans les campagnes électorales qui s’annoncent, interpeller tous les candidats et plus généralement participer aux combats citoyens sur cette base. Les décisions à prendre doivent être à la mesure de l’état catastrophique de la situation et de son urgence. Aussi bien sur le plan national que sur le plan européen ou international elles doivent faire systématiquement l’objet de la question : « cette décision sert-elle les plus démunis d’entre nous » ? On gagnerait beaucoup à les écouter en leur donnant la parole.

C’est dans cette perspective que le GES vous invite à signer (soit directement à l’adresse http://www.audit-citoyen.org/, soit sur les listes papier ci-jointes) et à diffuser le plus largement possible la pétition « Pour un audit citoyen de la dette » ; il vous propose conjointement une analyse de la situation qui justifie cette campagne.

Décembre 2011
Lucienne Gouguenheim, secrétaire du GES
lucienne.gouguenheim@numericable.com

Le GES regroupe 13 associations, membres de la fédération « Réseaux du Parvis » : Association culturelle de Boquen, CELEM, Chrétiens aujourd’hui Orléans, CSF 61, CSF 95, ECCO, Espérance 54, Evreux 13, NSAE, Partenia 2000, Partenia 77, Point 1-Rouen, Prêtres mariés – Chemins nouveaux.


Pétition à diffuser largement, à signer sur le site
http://www.audit-citoyen.org/


Pour un audit citoyen de la dette publique
Écoles, hôpitaux, hébergement d’urgence… Retraites, chômage, culture, environnement… nous vivons tous au quotidien l’austérité budgétaire et le pire est à venir. « Nous vivons au-dessus de nos moyens », telle est la rengaine que l’on nous ressasse dans les grands médias.
Maintenant « il faut rembourser la dette », nous répète-t-on matin et soir. « On n’a pas le choix, il faut rassurer les marchés financiers, sauver la bonne réputation, le triple A de la France ».
Nous refusons ces discours culpabilisateurs. Nous ne voulons pas assister en spectateurs à la remise en cause de tout ce qui rendait encore vivables nos sociétés, en France et en Europe.
Avons-nous trop dépensé pour l’école et la santé, ou bien les cadeaux fiscaux et sociaux depuis 20 ans ont-ils asséché les budgets ?

Cette dette a-t-elle été tout entière contractée dans l’intérêt général, ou bien peut-elle être considérée en partie comme illégitime? Qui détient ses titres et profite de l’austérité ? Pourquoi les États sont-il obligés de s’endetter auprès des marchés financiers et des banques, alors que celles-ci peuvent emprunter directement et pour moins cher à la Banque centrale européenne ?

Nous refusons que ces questions soient évacuées ou traitées dans notre dos par les experts officiels sous influence des lobbies économiques et financiers. Nous voulons y répondre nous-mêmes dans le cadre d’un vaste débat démocratique qui décidera de notre avenir commun.

En fin de compte, ne sommes-nous plus que des jouets entre les mains des actionnaires, des spéculateurs et des créanciers, ou bien encore des citoyens, capables de délibérer ensemble de notre avenir ?

Nous nous mobilisons dans nos villes, nos quartiers, nos villages, nos lieux de travail, en lançant un vaste audit citoyen de la dette publique. Nous créons au plan national et local des collectifs pour un audit citoyen, avec nos syndicats et associations, avec des experts
Je signe la pétition pour un audit citoyen de la dette publique

Nom Prénom Adresse mail/physique Activité

 

 

Comprendre le mécanisme de la dette

Pourquoi il faut réclamer un audit

Qui emprunte ? Les particuliers, les entreprises, les investisseurs, les banques…, on parle alors de « dette privée » et les Etats (ou organismes publics, collectivités locales…), on parle alors de « dette publique ». Il n’est débattu aujourd’hui dans le grand public que de la dette publique, mais la dette privée est beaucoup plus volumineuse. A l’échelle mondiale, l’addition des dettes privées se monte à 117 000 milliards de dollars, soit 3 fois plus que celle des dettes publiques (41 000 milliards de dollars).

Quand une entreprise privée ne peut pas payer, elle fait faillite (exemple : Enron en 2001 ; les banques d’affaires Merril Lynch et Lehman Brothers en 2008), ses créanciers peuvent la vendre et elle disparaît ; la faillite relève du droit privé. Quand un Etat ne peut plus rembourser (ce qui pourrait arriver à la Grèce), il fait défaut, ce qui n’est pas une faillite. Un Etat relève du droit international qui lui donne un certain nombre de possibilités : décréter un moratoire, opérer un audit public des réalités de sa dette pour en faire le tri, en restructurer ou en annuler une partie, quitte à subir des mesures de rétorsion des créanciers à évaluer, mais il ne disparaît pas pour autant !

Qui prête ? Les banques et plus généralement les investisseurs institutionnels (sociétés d’investissement, sociétés d’assurances, fonds de pension) : on les appelle communément les « zinzins ». Ces investisseurs collectent de l’épargne et placent l’argent sur les marchés.

La banque centrale d’un pays gère la politique monétaire et détient le monopole de l’émission de la monnaie nationale. C’est auprès d’elle que les banques commerciales s’approvisionnent en monnaie selon un prix déterminé par les taux directeurs. En France, à partir de 1973, il a été décidé que la Banque de France ne prêterait plus à l’Etat, qui ne pourrait désormais emprunter qu’aux banques privées. Il en est de même aujourd’hui pour la Banque Centrale Européenne – BCE – qui est la banque centrale de la zone euro (cette clause fait partie de son statut via l’article 123 du traité de Lisbonne). Au contraire, aux USA, la Banque Fédérale intervient à la demande du gouvernement fédéral pour créer de la monnaie. Le danger de la création excessive de monnaie est l’inflation : cette monnaie perd de sa valeur d’échange avec d’autres monnaies.

La BCE ne peut donc pas acheter directement, lors de leur émission (sur le marché primaire), des titres de dettes publiques européennes, mais elle peut les racheter sur le marché secondaire ; en contrepartie, elle est amenée à créer de la monnaie, c’est ce qu’on appelle « monétiser la dette ».

Le marché secondaire ou le marché de gré à gré fonctionnent comme un marché d’occasion (que l’on peut comparer au marché des voitures usagées) ; il estpeu contrôlé pour le premier ou pas du tout pour le second : le vendeur et l’acheteur se mettent d’accord sur le prix.

Les zinzins et les fonds spéculatifs achètent ou vendent les titres « usagés » sur le marché secondaire ou sur le marché de gré à gré (voir exemple en annexe 1).

Il y avait jusqu’en 1984 deux sortes de banques privées :

– les banques de dépôt travaillant avec leurs clients (particuliers, entreprises) ; elles reçoivent des dépôts et leur accordent des prêts ;

– les banques dites d’« investissement » (qu’on devrait appeler « banques de placements financiers ») ayant une activité sur les marchés financiers.

Leur fusion est relativement récente (1984). Depuis cette époque, les deux types d’activité ne sont plus séparés au sein d’un établissement bancaire et les dépôts des clients sont placés sur les marchés.

– La confusion entre les deux fonctions peut faire croire que « les banques, c’est notre épargne ». Mais l’épargne des particuliers n’est qu’une infime partie des capitaux qui circulent sur les marchés.

Pourquoi les investisseurs prêtent-ils ? En premier lieu pour faire du profit grâce aux intérêts perçus. Quand ils ont beaucoup de fonds, ils cherchent à tout prix à prêter pour placer et donc rentabiliser leurs avoirs. S’il y a peu de demande, ils incitent à emprunter en baissant les taux d’intérêt et en prenant des risques. S’il y a beaucoup de demande, ils décident des taux d’intérêts appliqués à chacun en fonction du risque qu’ils évaluent (=> les agences de notation).

Pourquoi emprunte-t-on ? Pour investir (le retour est différé dans le temps ; exemples : l’éducation nationale, la construction d’autoroutes…), pour assurer une dépense dont on diffère le paiement (exemple : acheter une voiture ou un appartement « à crédit ») ; il y a problème si l’emprunteur surestime ses capacités de rembourser (les intérêts ou le capital) ou s’il n’a pas connaissance ou conscience de règles qui modifient les taux d’intérêt au cours du temps.

Il y a des situations où l’investisseur pousse l’emprunteur à emprunter au-delà de ses capacités de rembourser.

• Exemple 1 : l’endettement de pays du Sud dans les années 1973 où les zinzins avaient beaucoup d’argent – les pétrodollars – à placer et ont prêté même à taux zéro (au départ !).

En 2005, les pays du tiers-monde endettés, qui avaient versé 102 fois le montant de leur dette de 1970, devaient encore aux pays et aux banques du Nord 48 fois le montant de la dette initiale. (Source : D. Millet et Eric Toussaint « Les chiffres de la dette », CADTM, 2009)

• Exemple 2 : la crise des « subprimes » (crédits hypothécaires) aux USA en 2007, où les particuliers avaient été poussés à acheter leur appartement à crédit (avec des taux faibles au départ) parce que l’immobilier était en pleine expansion (il fallait vendre, y compris à des personnes insolvables) ;

• Exemple 3 : la crise actuelle de la Grèce (source : « Dans l’œil du cyclone »). En octobre 2009, le gouvernement grec cherchait à emprunter 1 500 millions d’euros pour une période de 3 mois, le taux était de 0,35 % ; les investisseurs lui ont proposé 7 040 millions, soit près de 5 fois la somme, et la Grèce a finalement emprunté 2 400 millions. La Grèce a bien été poussée à s’endetter. Les banques privées, en prêtant à bas taux d’intérêt, ont contribué activement à pousser la Grèce dans le piège d’un endettement insoutenable, puis ont exigé des taux beaucoup plus élevés qui ont empêché la Grèce de pouvoir emprunter au-delà d’une durée d’un an.

Dans ce cas, où l’emprunteur emprunte au-delà de ses capacités de remboursement, il se produit un effet boule de neige : l’emprunteur qui ne peut pas payer les intérêts et/où le capital quand le remboursement arrive à échéance, est amené à emprunter à nouveau pour les payer : sa dette augmente ainsi que les intérêts qu’il doit payer. Il peut même arriver (selon les clauses de l’emprunt) que les intérêts dus soient ajoutés au capital (et donc portent intérêt à leur tour).

Le budget d’un État ne peut pas être comparé au budget d’un particulier. Pour au moins deux raisons essentielles : un État peut dans une large mesure décider du montant de ses recettes par sa politique fiscale ; ses dépenses auront un impact sur ses recettes : elles financent des infrastructures, des investissements, des salaires. Le budget de l’État est un instrument de politique économique. En outre, un ménage dispose d’un nombre d’années limité pour rembourser ses dettes (au-delà d’un certain âge, les banques ne font plus de crédit) ce qui n’est pas le cas d’un Etat qui n’a pas ces limites.

D’où provient le déficit de l’Etat ?

trop de dépenses : l’Etat est-il trop généreux ? Y a-t-il trop de fonctionnaires, trop de services publics, trop de prestations sociales ? C’est la seule analyse qui nous est présentée ; c’est celle qu’a faite le FMI en imposant des plans d’ajustement structurel aux pays du Sud endettés ; c’est celle qui impose la politique de « rigueur » aujourd’hui à l’intérieur de l’UE. Elle devrait être approfondie en recherchant dans les budgets des Etats les sources exactes des dépenses.

Un examen des chiffres montre par exemple qu’en France la part dans le PIB des dépenses publiques dans leur ensemble (budget de l’État, des collectivités territoriales, des administrations de sécurité sociale qui rassemblent les hôpitaux publics et l’ensemble des régimes de sécurité sociale) est globalement stable depuis plusieurs années. L’augmentation des dépenses est due au remboursement de la dette.

moins de recettes : la crise diminue les rentrées d’impôts ; mais il y a aussi un manque à gagner qui provient de façon générale de la politique fiscale : évasion fiscale, paradis fiscaux, « cadeaux fiscaux » (exonérations de particuliers ou d’entreprises, barèmes de l’impôt sur le revenu)…

En avril 2010, dans leur rapport sur la situation des finances publiques pour le gouvernement, J.-P. Cotis et P. Champsaur, respectivement directeur et ancien directeur de l’INSEE, notent que « Depuis 1999, l’ensemble des mesures nouvelles prises en matière de prélèvements obligatoires ont ainsi réduit les recettes publiques de près de 3 points de PIB : une première fois entre 1999 et 2002 ; une deuxième fois entre 2006 et 2008. Si la législation était restée celle de 1999, (…) la dette publique serait environ 20 points de PIB plus faible aujourd’hui » (p 13).

Les citoyens ont besoin de comprendre si ce qu’on leur impose est juste ou non. Cela passe par l’analyse de la situation précise des dépenses et des recettes. La mécanique qu’est la dette publique brille aussi (si l’on peut dire !) par son opacité. Il est interdit par la loi, par exemple, de connaître l’identité des détenteurs de la dette. Ce sont des banques privées qui tiennent depuis 30 ans le marché primaire de la dette publique.

Exemple (source « La dette ou la vie », chapitre 10 par Pascal Franchet)

Pour juger de l’importance relative des différentes dépenses, on doit se reporter au budget de l’Etat, où apparaissent les différents secteurs : par exemple, on peut lire dans le budget 2010 de la France : défense 11%, pensions 13%, enseignement scolaire 16%, justice 6%, service de la dette 17%. Le total des dépenses s’élève à 285,7 milliards d’euros. En y regardant de plus près, on voit que le service de la dette ne comprend que le paiement des intérêts. Le remboursement du capital (venu à échéance en 2010) n’apparaît pas ! Il faut beaucoup chercher dans les documents de l’Agence France Trésor qui gère la dette de l’Etat français pour découvrir que le remboursement de la dette venue à échéance se monte (toujours en 2010) à 83 milliards d’euros. Le total des dépenses en 2010 devient donc 285,7 + 83 = 368,7 milliards d’euros.

On voit alors les % sous un jour différent : ils deviennent : défense 8%, pensions 10%, enseignement scolaire 12%, justice 5% et service de la dette 37%. Ce dernier secteur apparaît alors comme le principal poste des dépenses publiques.

Il convient de regarder de près s’il est légitime de diminuer les autres dépenses publiques pour le « service de la dette » ; on doit se demander d’où provient la dette, qui la détient, comment elle s’est faite, au profit de qui.Derrière les dettes européennes, il y a des mécanismes d’ingénieries financières. Ils posent la question de savoir ce qui est vraiment « prêté », et donc de la légitimité de ce qu’on demande aux citoyens d’honorer au point de leur imposer une austérité drastique.

Le « système dette » (extrait de « L’audit, un outil essentiel … » par María Lucia Fattorelli)

Beaucoup d’études, d’audits et d’enquêtes dans le monde ont déjà révélé que des montants significatifs enregistrés comme dette publique ne correspondent pas à de l’argent obtenu par des prêts. Par ailleurs, une large part de la dette des Etats est utilisée pour payer des intérêts et des amortissements de dettes précédentes dont la contrepartie n’est pas connue.

On comprend alors que l’instrument de la dette publique se transforme en un moyen de détournement des ressources publiques. Le manque de transparence dans ces processus et la grande quantité de privilèges – tant au niveau juridique que financier, avec de nombreuses ramifications – permet d’affirmer que ce modèle fonctionne comme un « système dette » au bénéfice d’un secteur restreint des marchés financiers. Les acteurs sont des grandes entreprises avec à leur tête de grandes banques et les puissantes agences de notation. Le « système dette » est une affaire très rentable pour eux..

Une part significative des titres émis par les Etats (ou garantis par eux) des pays endettés ne représente donc pas une « dette publique » réelle ou une émission de titres pour l’obtention de ressources pour le pays.

Les conséquences du « sauvetage des banques » où comment de la dette privée est devenue de la dette publique

Les institutions financières sauvées depuis 2008 ont acheté des titres du Trésor avec l’argent emprunté auprès des gouvernements – à bas taux d’intérêt – et ont utilisé ces liquidités pour des activités spéculatives. Elles essaient ainsi de gagner toujours plus d’argent en « investissant » dans la dette publique par l’émission de produits dérivés (négociés sur le marché secondaire ou le marché de gré à gré) toujours plus nombreux. Le résultat de ces opérations peut-il être considéré comme de la « dette publique » ? Les manuels d’économie expliquent que la dette publique est un instrument pouvant être utilisé pour financer les besoins de l’État et compléter les recettes fiscales pour que l’Etat puisse exercer ses compétences au bénéfice de la société. Les titres émis sans aucun critère pour le sauvetage des banques devraient être considérés comme des prêts distincts devant être remboursés par les banques, et non par la société dans son ensemble.

Conclusion : nécessité d’un audit « citoyen » de la dette, permettant de découvrir tout ce qui est caché, qui est responsable de quoi et d’en déduire la partie illégitime de la dette, que les Etats n’ont pas à rembourser (cf. Annexe 2).

D’où vient la dette? A-t-elle été contractée dans l’intérêt général, ou bien au bénéfice de minorités déjà privilégiées? Qui détient ses titres? Peut-on alléger son fardeau autrement qu’en appauvrissant les populations ? Ces questions, de plus en plus nombreux sont ceux qui se les posent. Dans toute l’Europe et en France un large débat démocratique est urgent, car les réponses apportées à ces questions détermineront notre avenir. C’est pourquoi nous signons et vous invitons à signet la pétition nationale lancée par le « collectif national pour un audit citoyen de la dette publique », afin de porter ce débat au cœur de la société.

Sources utilisées :

– « Dans l’oeil du cyclone : la crise de la dette dans l’Union européenne » par le CADTM (Comitépour l’annulation de la dette du tiers-monde)http://www.cadtm.org/Dans-l-oeil-du-cyclone-la-crise-de)

– « L’audit, un outil essentiel pour révéler les origines et les causes des actuelles crises de la “dette” aux Etats-Unis et en Europe » par María Lucia Fattorelli (http://www.cadtm.org/L-audit-un-outil-essentiel-pour)

– « La dette ou la vie » par Damien Millet et Eric Toussaint (éditions Aden)

– « Dette indigne » par Gérard Filoche et Jean-Jacques Chavigné (éditions J.C. Gawsewitch) – « Les dettes illégitimes » par François Chesnay (éditions Raisons d’agir)

– 4 pages Attac / Fondation Copernic (campagne sur l’audit citoyen de la dette publique)

 

Annexe 1

Deux exemples de pratiques financières qui touchent à l’arnaque

1- Le jeu des zinzins avec la BCE(exemple repris de l’article du CADTM intitulé « Dans l’œil du cyclone »)

La dernière fois que la Grèce a émis des titres pour une durée de 10 ans, c’était en mars 2010, pour obtenir 5 milliards d’euros ; elle s’est engagée alors à verser un intérêt de 6,25 % chaque année jusqu’en 2020. Cette année-là, elle devra rembourser le capital emprunté.

Depuis lors, elle n’emprunte plus à 10 ans sur les marchés car les taux ont explosé. Quand on nous annonce que le taux à 10 ans s’élève à 14,86% , cela donne une indication sur le prix auquel s’échangent les titres à 10 ans sur le marché secondaire ou sur le marché de gré à gré.

Les zinzins qui ont acheté ces titres en mars 2010 cherchent à s’en défaire sur le « marché d’occasion de la dette » car ces titres sont devenus à haut risque vu la possibilité que la Grèce se trouve dans l’incapacité de rembourser la valeur de ces titres à l’échéance prévue.

Concrètement, dans le cas des titres à 10 ans émis par la Grèce, comment se fixe le prix d’occasion ? Prenons un exemple concret, admettons qu’une banque ait acheté des titres grecs en mars 2010 pour une valeur de 500 millions d’euros. Imaginons que chaque titre vaut 1000 euros. La banque recevra donc chaque année une rémunération de 62,5 euros (soit 6,25% de 1000 euros) pour chaque titre de 1000 euros.

Aujourd’hui les titres émis à 10 ans par la Grèce en mars 2010 sont considérés comme à haut risque car il n’est pas sûr du tout que la Grèce saura rembourser l’entièreté du capital emprunté en 2020. Donc, des banques qui ont beaucoup de titres grecs revendent leurs titres sur le marché secondaire car elles ont trop d’actifs douteux, dans leurs bilans. Pour tenter de rassurer à la fois leurs actionnaires (pour qu’ils ne vendent pas à la bourse leurs actions), leurs clients qui y ont déposé leur épargne (pour qu’ils ne la retirent pas) et les autorités européennes, elles doivent se défaire d’un maximum de titres grecs alors qu’elles s’en sont gavées jusqu’en mars 2010. A quel prix peuvent-elles trouver acquéreurs ? C’est là que le taux de 14,86 % joue un rôle. Les fonds spéculatifs qui sont prêts à racheter des titres grecs émis en mars 2010 veulent un rendement de 14,86 %. S’ils achètent des titres qui rapportent 62,5 euros, il faut que cette somme corresponde à 14,86 % de leur prix d’achat, soit 420,50 euros. Bref, ils seront prêts à acheter des titres grecs si leurs détenteurs sont prêts à se contenter de ce prix.

En résumé : l’acheteur n’acceptera de payer que 420,50 euros pour un titre de 1000 euros s’il veut obtenir un taux d’intérêt réel de 14,86 %.

A ce prix-là, les banquiers cités ne sont pas facilement disposés à vendre. C’est là qu’intervient la BCE, en rachetant elle-même des titres grecs sur le marché secondaire. La BCE achète aux banques privées qui veulent s’en défaire des titres de la dette grecque avec une décote qui tourne autour de 20 %. Elle paie autour de 800 euros pour acquérir un titre qui valait 1000 euros au moment de l’émission. Or ces titres valent beaucoup moins que cela sur le marché secondaire ou sur le marché de gré à gré.

On peut imaginer pourquoi les banques apprécient vivement que la BCE leur offre 800 euros au lieu du prix du marché !

Mais les rachats de titres par la BCE permettent aussi aux zinzins de spéculer et d’engranger des profits juteux. Les banques peuvent racheter des titres sur le marché d’occasion à des prix cassés (42,5% de leur valeur) et les revendre à la BCE à 80%.

Le volume de ce type d’opérations auquel les banques peuvent se livrer est peut-être marginal, il est difficile d’avoir une idée précise là-dessus. Il n’en reste pas moins qu’il est très rentable et ni la BCE ni les autorités des marchés ne sont capables, si elles en ont la volonté, de l’empêcher.

2- La manipulation des « Credit default swap » (CDS)

Les CDS sont des contrats d’assurance qui protègent un acheteur d’une créance.

Dans le cas de la Grèce, par exemple, les acheteurs de la dette publique grecque ont pu acheter des CDS pour s’assurer qu’en cas d’incident de paiement, ils seraient dédommagés. Mais des opérateurs financiers ne possédant pas de titres de cette dette ont pu aussi en acheter. Ces opérateurs spéculent alors sur la baisse de la valeur des titres de la dette grecque sur le marché boursier afin d’augmenter le montant de la prime liée aux CDS qu’ils possèdent. C’est ce que Georges Papandréou appelait « prendre une assurance sur la maison du voisin puis y mettre le feu pour toucher le montant de la garantie ».

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Annexe 2 : Questions à poser pour l’audit

• Pourquoi l’État a-t-il été amené à contracter une dette qui ne cesse d’enfler ?

• Au service de quels choix politiques et de quels intérêts sociaux la dette a-t-elle été contractée ?

• Qui en a profité ?

• Etait-il possible ou nécessaire de faire d’autres choix ?

• Qui sont les prêteurs ?

• Qui détient la dette ?

• Les prêteurs mettent-ils des conditions à l’octroi des prêts ? Lesquelles ?

• Quelle est la rémunération des prêteurs ?

• Comment l’État s’est-il trouvé engagé, par quelle décision, prise à quel titre ?

• Quel montant d’intérêts a été payé, à quel taux, quelle part du principal a déjà été remboursée ?

• Comment des dettes privées sont-elles devenues « publiques » ?

• Dans quelles conditions a été réalisé tel sauvetage bancaire ? Quel en est le coût ?

Qui a pris la décision ?

• Doit-on indemniser des actionnaires qui sont responsables du désastre avec les administrateurs qu’ils ont désignés ?

• Quelle est la part du budget de l’État qui va au remboursement du capital et des intérêts de la dette ?

• Comment l’État finance-t-il le remboursement de la dette ?

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Pas la finance d’abord mais l’humain…

L’Europe est emportée dans une crise provoquée et organisée par le capitalisme financier et spéculatif. La finance semble être la source de toutes les décisions.
Le système financier et politique crée les conditions pour que les plus riches s’enrichissent par la spéculation au détriment de toute économie réelle et en plaçant leur argent dans des paradis fiscaux pour en tirer un maximum de profits. Ce type de capitalisme conduit à une impasse économique et sociale.

Les pouvoirs publics font payer aux populations les conséquences de la crise financière. Ils imposent des plans de réduction des dépenses publiques détruisant des services vitaux indispensables pour le bien commun (écoles, hôpitaux…)
Ils laissent faire des plans de restructuration et de délocalisation qui écrasent ceux qui travaillent et leurs familles.
Cela entraîne la dégradation du tissu économique, social et l’accroissement de la précarité et de la paupérisation.
Les gouvernants et les financiers nous font payer la crise qu’ils organisent.

L’endettement des pays entraîne une course à l’emprunt qui fragilise les économies. Les taux d’intérêt élevés sont imposés par les prêteurs qui sont eux-mêmes fragilisés par la peur du non-remboursement de la dette.

L’Union Européenne et le F.M.I. imposent des plans successifs d’austérité. Il semble, que pour sortir de la crise, il n’y a pas d’autre choix que de rassurer les marchés financiers
C’est un fonctionnement infernal sur lequel les peuples n’ont plus de prise. La démocratie est bafouée, elle n’existe plus. Les besoins des peuples n’existent plus. Les politiques sociales, écologiques ne deviennent plus prioritaires.
Le débat et le fonctionnement démocratique sont considérés comme inutiles.


Nous souhaitons un autre modèle de vie en société.

Remettons l’humain au centre de la société. Redonnons à la démocratie le pouvoir de décision.

Il n’y a pas que la dette à sauver, il y a d’abord l’humain, la reconnaissance d’une place pour chaque personne dans la société.
L’argent doit être au service des personnes, de la vie sociale, de l’économie…

Construisons un vrai débat démocratique et proposons des alternatives à cette société construite sur la finance.

Notre soutien doit aller dans les luttes contre la précarité et l’exclusion : des millions de personnes, en France, sont en dessous du seuil de pauvreté. Redonnons la dignité à ces personnes par des ressources suffisantes. Réduisons les inégalités financières, les inégalités femmes/hommes, dénonçons la suppression des services publics.

Mettons en place des sécurités : le droit à un revenu d’existence, le droit au logement, le droit à vivre ses valeurs spirituelles.

Nous appelons à prendre en main nos destins et à participer à toutes les actions proposées dans les semaines et mois qui viennent pour combattre l’austérité et changer de politique.
Demandons aux candidats qui vont se présenter aux différents élections un engagement pour plus de justice sociale.

A l’écoute de l’Evangile : « Il renverse les puissants de leur trône, il élève les humbles… Bienheureux ceux qui soutiennent les pauvres… Bienheureux ceux qui ont soif de justice… » Partageons le combat de toutes celles et de tous ceux qui sont engagés pour une monde plus fraternel, au côté des exclus et de tous ceux qui luttent pour la justice, mais également de tous les indignés à travers le monde qui manifestent contre cette dictature financière.
Nos convictions spirituelles, à la lumière des Evangiles nous poussent à rechercher plus de justice, plus de partage dans une société plus égalitaire.

Montrons qu’un autre monde est réellement possible avec pour base la vie fraternelle.

Développons nos capacités d’actions et de créations…


(Une réflexion sur ces différents thèmes est en cours à Parvis, notamment dans le groupe Evangile et Société. Toutes les contributions sont les bienvenues).

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Ils nous font payer la Crise !

Équipe de chrétiens en classe ouvrière du secteur de Caen (ECCO)

Communiqué de presse

ILS NOUS FONT PAYER LA CRISE

La crise actuelle n’est pas de notre fait !
Elle est provoquée et organisée par le capitalisme financier et spéculatif !

Le système capitaliste financier et les politiques qui le soutiennent permettent que l’argent se multiplie entre les mains de ceux qui, de plus en plus nombreux, le possèdent. Ce système déréglementé leur permet de tirer un maximum de profits et de placer leur fortune dans les paradis fiscaux pour spéculer au dehors et au détriment de toute économie réelle. Aujourd’hui ce système s’attaque aux dettes des États jusqu’à remettre en cause leur souveraineté et la démocratie.

Soumises à ce capitalisme-là, les politiques actuelles menées par de nombreux pays européens dont la France conduisent à une impasse économique et sociale.
Les pouvoirs politiques en place font payer aux populations la folie des vrais responsables de la crise financière qui, eux, s’enrichissent en plus avec les intérêts de la dette. Ils imposent des plans de réduction des dépenses publiques détruisant des services vitaux indispensables pour l’avenir et le bien commun (école, hôpital, etc…). Ils s’attaquent à la protection sociale (droit du travail, sécurité sociale, retraites, etc…) pour la démanteler et passer au secteur privé ce qui est rentable. Ils laissent faire des plans de restructuration et de délocalisation qui écrasent les travailleurs et leurs familles. Cela entraîne la dégradation du tissu économique et social et l’accroissement du chômage, de la précarité et de la paupérisation.
C’est ainsi que gouvernants et financiers nous font payer la crise qu’ils organisent.

Nous refusons que la finance soit utilisée pour broyer les peuples au profit des plus riches. L’argent doit être au service des hommes, de la vie sociale et de l’économie. Aussi nous affirmons qu’il faut changer de politique et de modèle économique.

Militants chrétiens en classe ouvrière, nous partageons le combat de toutes celles et de tous ceux qui luttent avec leurs syndicats, associations et partis, mais également de tous les indignés à travers le monde qui manifestent contre cette dictature financière. Nous appelons à prendre en main nos destins et à participer à toutes les actions proposées dans les semaines et mois qui viennent pour combattre l’austérité et changer de politique.

Caen le 7 décembre 2011

Bernadette Biniakounou, Anick et Michel Carabeux, Marie-Thérèse Colin, Colette Fourdeux, Michel Gigand, Marie-Luce Landreau, Michel Leconte, Michel Lefort, Pierre Leduc, Jean-Marie Peynard, José Reis et Claude Simon.

Contact: Jean-Marie Peynard 02 31 20 26 70

Appel du Groupe « Evangile et société » (GES) à signer la pétition
« Pour un audit citoyen de la dette publique »

La crise sert d’alibi et de moteur pour poursuivre une politique qui affecte en priorité les petits, les pauvres, ceux qui sont sous le seuil de pauvreté.
Ce sont ceux-là le cœur de notre combat : rendre leur dignité à tous ceux qui sont esclaves de la misère… 7millions et demi de salariés qui perçoivent moins de 750 € par mois, ce qui touche près de 30 millions de personnes. Inadmissible aussi bien pour le citoyen que pour le disciple déclaré du fils de l’homme, Jésus de Nazareth. Tous les dimanches de l’Avent parlaient de justice pour les cassés de la vie. La bonne nouvelle est pour eux, en priorité. Et nous, nous sommes invités – c’est notre mission d’êtres humains – à mettre tous nos moyens, toute notre énergie à libérer nos frères de l’esclavage dans lequel les régimes économiques, financiers et politiques les maintiennent, voire les enfoncent, avec notre complicité de fait.

Nous relisons Matthieu, en commençant par les toutes premières parole de Jésus au moment de son baptême par Jean au Jourdain : « Tout ce qui est juste doit être établi, faisons en sorte de l’accomplir ».
Et puis : « Allons avec courage sur les chemins de la justice à la rencontre du Seigneur ». Le Dieu auquel nous croyons « Vient à la rencontre de celui qui pratique (agit) la justice avec joie » ; « Ciel nouveau et terre nouvelle où résidera la justice » ; « Porter la bonne nouvelle aux pauvres, guérir les coeurs brisée, annoncer aux captifs la délivrance, la liberté aux captifs…. » ; « Il comble de biens les affamés et renvoie les riches les mains vides »
Ces paroles de l’Avent définissent clairement notre but, notre objectif, notre mission.

Au sein des Parvis, des groupes, des personnes ont déjà exprimé leur inquiétude et leur indignation devant la situation économique et sociale et le problème de la crise financière et de la dette des Etats européens (voir par exemple sur le site http://www.reseaux-parvis.fr/ la déclaration : « Crise… Dette… une autre Parole pour plus de justice » et le communiqué de presse du groupe ECCO : « Ils nous font payer la crise »).

Le GES veut être présent dans les campagnes électorales qui s’annoncent, interpeller tous les candidats et plus généralement participer aux combats citoyens sur cette base. Les décisions à prendre doivent être à la mesure de l’état catastrophique de la situation et de son urgence. Aussi bien sur le plan national que sur le plan européen ou international elles doivent faire systématiquement l’objet de la question : « cette décision sert-elle les plus démunis d’entre nous » ? On gagnerait beaucoup à les écouter en leur donnant la parole.

C’est dans cette perspective que le GES vous invite à signer (soit directement à l’adresse http://www.audit-citoyen.org/, soit sur les listes papier ci-jointes) et à diffuser le plus largement possible la pétition « Pour un audit citoyen de la dette » ; il vous propose conjointement une analyse de la situation qui justifie cette campagne.

Décembre 2011
Lucienne Gouguenheim, secrétaire du GES
lucienne.gouguenheim@numericable.com

Le GES regroupe 13 associations, membres de la fédération « Réseaux du Parvis » : Association culturelle de Boquen, CELEM, Chrétiens aujourd’hui Orléans, CSF 61, CSF 95, ECCO, Espérance 54, Evreux 13, NSAE, Partenia 2000, Partenia 77, Point 1-Rouen, Prêtres mariés – Chemins nouveaux.

Pétition à diffuser largement, à signer sur le site
http://www.audit-citoyen.org/


Pour un audit citoyen de la dette publique
Écoles, hôpitaux, hébergement d’urgence… Retraites, chômage, culture, environnement… nous vivons tous au quotidien l’austérité budgétaire et le pire est à venir. « Nous vivons au-dessus de nos moyens », telle est la rengaine que l’on nous ressasse dans les grands médias.
Maintenant « il faut rembourser la dette », nous répète-t-on matin et soir. « On n’a pas le choix, il faut rassurer les marchés financiers, sauver la bonne réputation, le triple A de la France ».
Nous refusons ces discours culpabilisateurs. Nous ne voulons pas assister en spectateurs à la remise en cause de tout ce qui rendait encore vivables nos sociétés, en France et en Europe.
Avons-nous trop dépensé pour l’école et la santé, ou bien les cadeaux fiscaux et sociaux depuis 20 ans ont-ils asséché les budgets ?

Cette dette a-t-elle été tout entière contractée dans l’intérêt général, ou bien peut-elle être considérée en partie comme illégitime? Qui détient ses titres et profite de l’austérité ? Pourquoi les États sont-il obligés de s’endetter auprès des marchés financiers et des banques, alors que celles-ci peuvent emprunter directement et pour moins cher à la Banque centrale européenne ?

Nous refusons que ces questions soient évacuées ou traitées dans notre dos par les experts officiels sous influence des lobbies économiques et financiers. Nous voulons y répondre nous-mêmes dans le cadre d’un vaste débat démocratique qui décidera de notre avenir commun.

En fin de compte, ne sommes-nous plus que des jouets entre les mains des actionnaires, des spéculateurs et des créanciers, ou bien encore des citoyens, capables de délibérer ensemble de notre avenir ?

Nous nous mobilisons dans nos villes, nos quartiers, nos villages, nos lieux de travail, en lançant un vaste audit citoyen de la dette publique. Nous créons au plan national et local des collectifs pour un audit citoyen, avec nos syndicats et associations, avec des experts
Je signe la pétition pour un audit citoyen de la dette publique

Nom Prénom Adresse mail/physique Activité




Une contribution, AG Angers 2011 : faire ruptures… rechercher, créer des signes d’espérance.

Écrit par Les Réseaux du Parvis
Jeudi, 15 Mars 2012 19:20

Une contribution pour l’AG « Angers 2011 » : faire ruptures… rechercher et créer des signes d’espérance.

Nous avons vécu dans l’illusion du progrès infini, « c’est le grand mythe de l’Occident » nous dit Edgar Morin.
Mais, actuellement, la crise, la dette, l’augmentation des inégalités, les problèmes écologiques… font ruptures dans cet univers du progrès. Ce nouveau contexte crée un climat d’incertitude pour l’avenir.

C’est peut-être à nous de faire ruptures avec un monde qui nous emmène malgré nous vers des chemins sans issue.

Pour vivre autrement, nous avons besoin de faire des ruptures :

Avec l’hyperconsommation qui envahit notre espace : la personne est réduite à un objet qui consomme et qui produit avec des conséquences très importantes pour l’avenir de la planète. Faire rupture c’est rechercher de la sobriété dans la consommation, rechercher la production de proximité, prendre soin de notre humanité.

Faire rupture, c’est dénoncer la dévalorisation de la personne prise en compte seulement dans une logique comptable. Les savoirs pris en compte n’ont de valeur que s’ils ont une valeur marchande, comptable, et pourtant, le temps de la rencontre, du cheminement, de la réflexion à plusieurs sont essentiels dans les domaines de la santé psychique, physique, dans le social, dans les services rendus à la personne, dans l’éducation…
Les grilles d’évaluation et les protocoles « codés » envahissent le domaine des services en détruisant la qualité de ces services. Dénonçons cette course aux nomenclatures quantifiables, monétarisées. Dénonçons cette ère du coaching permanent et redonnons du temps à la prise en compte de la personne humaine comme être relationnel. « La chose a un prix, l’homme a une dignité » nous dit Kant.

Faire rupture, c’est actuellement dénoncer les spéculations des banques, les placements à risques, les emprunts toxiques, le capitalisme financier déconnecté de l’économie réelle. Dénoncer les spéculations sur les matières premières : le pétrole, les minéraux, les céréales etc…

Faire rupture, c’est dénoncer la suppression des services publics, les services de proximité qui créent de l’humain, de la solidarité, de la convivialité : les services de la poste, de la santé, de la justice, de l’éducation, les commerces de proximité… Il y a une dégradation de la qualité de la vie au quotidien. La course à la rentabilité immédiate et à la compétition détruit le tissu humain, les liens qui se tissent dans la proximité, le voisinage, le maintien de la santé et des relations quotidiennes.

Faire rupture « avec les systèmes techniciens » (Jacques Ellul). La technicité a emporté la planète vers une course à la productivité de compétition. La technique, l’économie, le marché prennent le pas sur le politique et les choix de vie. La compétition et la fabrication au moindre coût entraîne des délocalisations au moindre prix. Le salarié n’est plus reconnu dans sa tâche de création et de participation à une construction collective, les choix privilégient le moindre coût et la rentabilité financière pour les actionnaires.

D’autres choix sont possibles. Ne recherchons pas, dans tous les domaines, la croissance à tout prix. L’option croissance pour certains produits et décroissance pour d’autres peut réorienter un choix de société vers une économie verte, les sources d’énergie renouvelable, l’économie solidaire, une agriculture biologique respectueuse de l’environnement. Investissons dans l’éducation, la recherche, les transports publics… pour reconstruire un processus d’humanisation.

Faire rupture avec l’Institution Eglise sclérosée. « Un climat de restauration s’appesantit dans l’Eglise » nous dit Gérard Bessière, « des théologiens universitaires, des prêtres, des diacres… élèvent la voix mais personne n’est entendu ».
L’équipe nationale « Jonas » nous dit que ces protestations expriment un malaise profond et formulent des demandes précises. Ce qu’il faut surtout dénoncer, nous l’équipe « Jonas », « c’est la rupture culturelle qui s’établit entre l’Eglise et la société… Le langage, les rites, la communication sont décalés et ne sont plus porteurs de sens… »
Dans notre liberté de penser et de croire, refusons une parole « surplombante et enfermante. Soyons ouverts à l’écoute des cris à l’intérieur de l’institution, hors de l’institution. Ecoutons cette soif de dignité et de reconnaissance d’une place pour chacun dans la vie de nos groupes et de la société en étant ouverts à la richesse des différentes cultures.

Dans ce contexte, repérons, nommons, et créons des signes d’espérance pour que le futur ne soit pas le temps de peur mais le temps de la métamorphose.
« L’improbable, mais possible, est la métamorphose qui est un processus, à la fois d’auto-destruction et d’auto-reconstruction» nous dit Edgar Morin dans son livre « La Voie ».

Du fait d’un contexte incertain, il y a un affaissement de nos représentations de l’avenir, où est le temps des prophètes marqué par l’attente et l’espérance ? « Il est temps, nous dit Alain Touraine, de dégager le sens non seulement des idées nouvelles mais de pratiques individuelles et collectives qui manifestent les enjeux d’un nouveau monde… »

Des thèmes reviennent en force pour construire un avenir : l’avenir de la planète, la fraternité, la justice sociale, le développement des solidarités, la reconnaissance des cultures… L’engagement dans des associations qui oeuvrent pour plus d’humanité : RESF, ATTAC, La Cimade, Amnesty International, l’ACAT etc… « La communauté de destin de l’espèce humaine face à des problèmes vitaux appelle à une politique de l’humanité » nous dit Edgar Morin

« Il y a un bouillonnement créatif dans une dialectique de :
Mondialisation/démondialisation
Croissance/décroissance
Développement/enveloppement
Conservation/transformation »
Pour créer une politique de civilisation, prenons en compte les apports des différentes cultures, des différentes civilisations. Nous sommes dans le temps du métissage.
Dans cet objectif, soyons à l’écoute des personnes et des groupes, oeuvrons dans une recherche de plus de solidarité, de convivialité, construisons un « pacte civil » pour « vivre autrement » personnellement et collectivement.

« L’origine est devant nous » disait Heidegger. « On a le futur pour lequel on se bat » nous disait un conférencier sur les révoltes arabes. De nombreux mouvements lancent des appels, des pétitions pour qu’un « nouveau monde soit possible ». Des idées cheminent. « Les citoyens sont égaux devant les responsabilités publiques.» nous dit Pierre Rosanvallon.

Maurice Elain
Novembre 2011

Mise à jour le Dimanche, 29 Avril 2012 17:52




Mondialisation, financiarisation… Où est l’humain ?

Écrit par Les Réseaux du Parvis
Mercredi, 14 Mars 2012 13:21

« La mondialisation et le système financier sont en train de détruire la société occidentale » nous dit Alain Touraine (interview Télérama Janvier 2011). Peut-on espérer l’émergence de résistances et de nouvelles forces pour envisager un autre avenir ?

Les sommes gigantesques injectées, dans le temps de crise, ont empêché une crise mondiale mais ils n’ont permis que la reconstitution rapide des profits des banques. Pendant cette période, le chômage a augmenté, passant de 7% à 10% en France. Le taux de pauvreté a également augmenté. Il est entre 15% et 25% dans les pays occidentaux. La crise est toujours là, il n’y a que le secteur financier qui se soit redressé.

La grande majorité des peuples ne se révolte pas contre un système financier qui semble se jouer « ailleurs », dans des domaines où l’on se sent impuissant. Les Anglais votent pour des conservateurs qui font le seul choix du système financier. Ce choix peut, à long terme ruiner le pays…Des jeunes bougent en Espagne, en Grèce, en France…

Le mythe actuel n’est plus le progrès, l’industrialisation, mais le fantasme de retrouver la richesse par la finance. C’est le jeu spéculatif qui l’emporte : le blé et le café sont achetés avant leur production et l’on fait monter les prix pour spéculer, il y a des transferts de blé et de café purement fictifs.

Le système financier va couler l’occident : si vous ne produisez pas et que vous vous endettez, cela ne peut pas durer éternellement.

Après la domination coloniale, après le mouvement ouvrier, la société est parvenue à un meilleur partage des richesses et à la construction de protections sociales pendant les trente glorieuses…

Aujourd’hui, il n’y a plus de modèle social : les syndicats, la Sécurité sociale, les Services publics, tout cela est remplacé par l’argent.

Les mentalités ont changé. Les classes moyennes sont tentées de dire « si on aidait moins les classes populaires on s’en sortirait mieux », la peur de l’Etranger est ravivée.

Nous sommes dans un monde où l’éthique disparait, les projets à long terme disparaissent, on vit dans le moment présent, le zapping médiatique, l’absence d’objectifs, de valeurs, de contenu culturel. Des résistances et réactions apparaissent au Forum Social Mondial, avec ATTAC et de nombreux groupes qui proposent d’autres politiques. Nous y voyons des signes d’espérance.

Mais nous sommes devant une société où l’on vit dans un monde de consommation immédiate, de marchandisation, de spéculation, de non production et de désindustrialisation, nous sommes dans une économie mondialisée qui n’a plus de règles, qui a rompu les amarres.

La politique des entreprises consiste à se protéger des tempêtes et des tsunamis financiers en fragilisant les travailleurs qui sont en première ligne : délocalisations, choix d’abord du rendement financier pour rémunérer les actionnaires avant les salariés qui travaillent dans les Entreprises.

La financiarisation fait disparaître le social.

Le social c’est quoi ? C’est une manière d’utiliser les ressources matérielles, en les façonnant, les transformant pour en faire des formes d’organisations : écoles, hôpitaux, services publics… Actuellement ces services sont réduits, certains supprimés, par quoi va-t-on les remplacer ? Par de l’humanitaire qui ne pourra jamais être à la hauteur des problèmes à traiter ?

Actuellement, l’économie et le financier sont comme au-dessus de la société, inatteignables avec aucune prise, aucune modification possible… Les modèles socio-démocrates sont en recul partout même en Suède. L’extrême droite renait et s’amplifie…

Que peut-on construire pour résister à ce Tsunami financier qui emporte tout le monde ?

Sur quels leviers, quelles forces nous appuyer ?

Il y en a deux :

1- La force des idées de l’écologie, la protection de la planète, de l’environnement, travailler contre le réchauffement climatique. Travailler le rapport entre nature et culture en imposant des limites à la finance. Ces limites sont vitales pour l’avenir, c’est une question de vie ou de mort. Le réchauffement climatique va faire changer l’évolution de la planète, va entraîner des migrations climatiques.

2- La deuxième force est non pas la recherche de l’argent, de la spéculation mais la recherche des droits pour chaque personne. Hannah Arendt dit que l’espèce humaine est celle « qui a le droit d’avoir des droits ».

Un être humain, du fait de son existence a des droits que nous associons aux mots : dignité, respect, intégration dans la société, vivre la démocratie, l’égalité. Chaque individu a des droits à l’éducation, à la santé, à avoir des revenus suffisants pour vivre, à la formation professionnelle, avoir une activité, des relations… Pour être acteur dans la société, c’est le fonctionnement du don et du contre-don…

Faisons vivre ce grand principe des droits des personnes pour qu’un renouveau démocratique apparaisse partout. Où il y a de l’éducation, du progrès, il y a davantage de démocratie et de libertés.

Nous avons besoin de faire vivre ces valeurs universelles.

Max Weber parlait, au début du siècle de « l’éthique de la conviction. »

Nous avons besoin de mythes qui donnent de la force : l’homme à Tian’anmen debout devant un tank restera un symbole. L’homme Tunisien qui s’immole par le feu fait lever un vent de liberté et de révolution. Il déclenche une action collective.

Ne restons pas dans les idées dominantes de la consommation, la marchandisation, la spéculation, dans un climat d’insécurité et de peurs. Affirmons que la personne a des droits à faire valoir. Créons une société de citoyens qui ont des droits et nous construirons une démocratie où chacun s’appuiera sur ses droits pour être citoyen et participer à la vie de la société en respectant la diversité culturelle, en vivant égaux et différents.

Nous avons le droit d’être singuliers sans être démolis et réduits à des consommateurs, fondus dans une masse, un communautarisme.

Pour cela, il faut prendre le parti du faible, c’est cela l’universalisme. « En reconnaissant les droits du plus faible vous reconnaissez les droits de tous. » nous dit Alain Touraine. Cela s’inscrit dans la tradition Européenne de la déclaration des droits de l’homme… au mouvement ouvrier… mais aussi dans les luttes de Gandhi, Mandela, Martin Luther King…

Les personnalités, les modèles sont importants mais aussi les petits groupes, les petites communautés utopiques qui avancent des idées, militent, s’engagent…

Nous ne pouvons plus dire, aujourd’hui : je parle au nom de Dieu, de l’histoire, du progrès, de la nation, de la science. Les Evangiles doivent nous tenir en éveil pour analyser, interroger le fonctionnement de notre société afin de mettre la priorité sur la place de la personne et non pas de la finance.

 

Mise à jour le Dimanche, 29 Avril 2012 17:53




La domination de la sphère financière

Écrit par Les Réseaux du Parvis
Mardi, 13 Mars 2012 17:50

La domination de la sphère financière

Ne pas confondre économie monétaire et économie financière. Elle s’est autonomisée non seulement par rapport à la régulation politique, mais aussi aux grandes institutions bancaires : les nouveaux produits financiers, les marchés de gré à gré, les fonds vautours, private equity etc… Dans un monde qui demeure structuré en États nations multiples, la finance mondialement intégrée par les bourses et les marchés financiers met le monde sous la souveraineté de l’argent. Les pauvres dérangent.

La priorité donnée à la valeur pour l’actionnaire

Avant le profit était un reliquat de l’activité économique. Quand on avait rémunéré les salariés, payé les fournisseurs et acquitté les impôts et les charges sociales, ce qui restait était réinvesti dans l’entreprise pour son développement. Le reste allait aux actionnaires. Maintenant, c’est l’inverse. Le chef d’entreprise a pour objectif principal la valeur pour l’actionnaire. De ce fait, quelle que soit l’utilité sociale de ce qu’il produit, son entreprise est de fait transformée en institution financière. Les salaires sont une charge désignée comme insupportable. En 30 ans en France, la part des salaires est passée de 70% du revenu national à 60% tandis que les profits le sont de 30% à 40%. Les pauvres ne sont plus seulement des marginaux, ce sont les travailleurs les moins protégés par les lois et les conventions.

Une fiscalité insuffisamment redistributive

Le taux marginal de l’IRPP était de 65% après la Libération, il est aujourd’hui de 40%. C’est pourtant l’outil essentiel de réduction des inégalités des revenus et des patrimoines. Depuis 2007, les droits de succession ont été supprimés et le bouclier fiscal a été introduit. Les impôts

sur les sociétés sont beaucoup plus faibles qu’ils ne paraissent grâce à des exemptions importantes et l’existence de niches fiscales. Il n’y a plus d’argent pour les pauvres, et les associations qui les défendent sont étranglées. Les budgets des politiques sociales sont rabotés. Dans une société de plus en plus riche, où la majorité de la population a dépassé le seuil de satisfaction de ses besoins essentiels, l’objectif politique majeur ne doit plus être « enrichissez-vous », mais l’argent doit aller prioritairement à la satisfaction des besoins collectifs et à l’aide aux personnes en difficulté.

Propositions de l’Atelier :

– développer l’économie sociale, mutualiste, solidaire ;

– renforcer le commerce équitable ;

– faciliter le micro-crédit ;

– veiller à la façon dont on consomme personnellement et dont on place son épargne (cf. épargne solidaire) ;

– développer la citoyenneté responsable en éveillant les consciences. D’où insistance particulière sur :

1/le rôle décisif de l’éducation en général

2/l’importance d’une action sur la « culture », pour opérer le changement nécessaire des mentalités en matière de production, consommation, richesse, mode de vie ;

– mettre en valeur et développer des actions et des procès comme ceux menés par « Transparency International » ;

– remettre en cause une approche purement globale et quantitative du « taux de croissance », alors qu’il s’agit de savoir de quoi est faite concrètement la croissance ;

– actions et pressions à exercer au plan politique car, en régime démocratique, le pouvoir est contraint de tenir compte de l’opinion. Obtenir que le pouvoir politique contrôle le pouvoir financier ;

– pressions à exercer sur le Vatican qui est un des paradis fiscaux.

Devant le capitalisme brutal d’une oligarchie financière détruisant la planète et amplifiant les inégalités sociales, entraînant toute l’humanité vers une crise majeure, multiple aussi bien sur les plans humain, écologique, social et politique, nous lançons un appel à toutes les femmes et tous les hommes de foi et de bonne volonté à s’engager personnellement et collectivement. Que le souffle de l’Évangile transparaisse à chaque instant de nos vies, et qu’ensemble nous puissions célébrer la gloire de Dieu présent en notre humanité.




Les économistes et la crise

Des voix fortes commencent à se faire entendre, qui ciblent la responsabilité des économistes, interrogent la fiabilité de leurs analyses, la part d’idéologie dans la théorie. Pourquoi ont-ils affirmé depuis vingt-cinq ans qu’il n’était pas nécessaire de réguler la finance, qu’il suffit, pour assurer une croissance durable, d’avoir une faible inflation sur les marchés des biens, sans se préoccuper de l’évolution du prix des actifs (immobilier, actions etc.) ? Pour Joseph Stiglitz, qui fut directeur de la Banque Mondiale, la théorie économique est devenue un monde autosuffisant, une fausse représentation de la réalité. Il met en cause tout à la fois le rôle de l’outil mathématique et les présupposés libéraux qui ont « conduit la science économique à passer du statut de discipline scientifique à celui de supporter le plus enthousiaste du capitalisme de libre marché. »1

Les économistes ont misé sur les modèles simples de concurrence parfaite. Ces modèles ont un degré de sophistication qui leur donne une image de sérieux alors qu’ils se limitent aux conditions qui permettent d’aboutir à un résul-tat. Cependant, note Stiglitz, « une bonne partie des erreurs d’analyse de la théorie dominante ne provient pas d’un manque de sophistication mais d’hypothèses fausses ». D’où proviennent ces hypothèses ? Constatant que l’économie se heurte aujourd’hui au mur de l’orthodoxie néolibérale mise en place, dans les années 1980, autour de Friedrich von Hayek et de Milton Friedman, puis relayée idéologiquement et politiquement par Margaret Thatcher et Ronald Reagan, René Passet2-3 nous invite à replacer l’évolution de la science économique dans celle, plus générale, des connaissances et de la vision qu’elles donnent globalement du monde.

La théorie économique dominante actuelle se fonde sur des conceptions dépassées : rationalité des agents économiques, neutralité de la monnaie, foi inébranlable dans la régulation du marché. Elle tourne diamétralement le dos aux avancées scientifiques de notre temps que sont la complexité, le réseau, l’incertitude.

Il s’agit là d’une formidable régression. Dans sa grande fresque historique, fruit d’un travail de réflexion pluridisciplinaire, René Passet décrit les étapes successives de cette histoire parallèle de la conception du monde et de celle de l’économie. La vision mécanique de Newton inspire celle des économistes, tel David Ricardo, qui imaginent un système dont l’intérêt privé constitue le ressort, et la concurrence le moteur. On connaît la célèbre « main invisible » d’Adam Smith qui transforme spontanément les intérêts individuels en intérêt général.

Il existe une loi « gravitationnelle » des prix : l’offre et la demande ramènent mécaniquement le prix du marché

à son niveau « naturel ». La découverte de l’énergie et des lois de la thermodynamique, qui décrivent la transformation de la chaleur en mouvement (par Sadi Carnot), bouleverse Les grandes représentations du monde de l’économie.

2éd. LLL – Les liens qui libèrent,2010.

3Interview dans le n° du 25 octobre 2010 de

Télérama dont des éléments sont repris ici.

Cette vision d’un monde « horloger » est à la base de la révolution industrielle et d’un nouveau regard sur le monde qui rompt avec l’image de l’équilibre et de la répétition : le monde évolue, comme va aussi le montrer Darwin. La théorie économique suit le pas. À la loi de la conservation – une fois brûlé, le charbon existe encore à l’état de gaz et de cendres -, correspond l’idée d’une permanence malgré tout : c’est la conception de l’ « équilibre général » des marchés de Léon Walras (1834-1910), l’équilibre de chaque marché dépendant de celui de tous les autres.

La loi de la dégradation (une fois brûlé, le charbon ne pourra plus engendrer le mouvement) suggère que l’Univers marche vers la mort thermique. Marx (1818-1883) et Engels (1820-1895), également influencés par la pensée de Hegel, pour qui l’Univers évolue selon un processus de continuel dépassement, s’en inspireront pour décrire l’autodestruction du système capitaliste. Puis apparaît au niveau de l’infiniment grand le monde de la relativité, révélé par Einstein, et au niveau de l’infiniment petit la mécanique quantique qui bouleverse la vision de la réalité. À cette même époque, Freud dévoile les profondeurs de l’inconscient humain. C’est dans ce cadre nouveau que John Maynard Keynes (1883-1946) construit son oeuvre en relativisant la théorie économique classique comme Einstein a relativisé l’univers newtonien.

Ainsi, comme Einstein intégrait le temps et l’espace dans un concept unique d’espace-temps, Keynes intègre la monnaie, porteuse de temps, à l’espace de l’économie réelle alors que les classiques la tenaient à l’écart, la considérant comme neutre. Keynes s’inspire aussi de Freud pour établir les fondements psychanalytiques des comportements individuels et, au niveau collectif, ceux des marchés. Au présupposé classique de la rationalité des marchés, qui évacuaient l’imperfection des connaissances et des comportements humains, il oppose l’incertitude dans laquelle les acteurs économiques sont condamnés à agir.

Aujourd’hui, l’esprit humain est entré dans le champ économique en tant que facteur de production, au même titre que le capital ou la force musculaire. L’information s’étend désormais à tous les aspects de l’activité humaine. Et elle fonctionne en réseau à l’échelle du monde. C’est désormais dans ce cadre que s’organise la vie économique. Parallèlement, notre regard sur l’Univers a de nouveau changé. Les anciennes conceptions butaient sur la question de la vie. Comment aurait-elle pu jaillir du monde « horloger », au mouvement éternellement recommencé, ou de celui marchant irrémédiablement vers sa dégradation ? Si la vie est apparue, c’est qu’il y a dans ce monde des forces et des énergies qui la conduisent à se complexifier sans cesse, du big bang au cerveau humain. C’est cet univers complexe qu’il s’agit aujourd’hui de décrypter.

Les ordinateurs permettent des calculs qui révèlent des phénomènes jusqu’ici inaccessibles à la connaissance : nouvelles théories dites du chaos, celle des «structures dissipatives» d’Ilya Prigogine ou des « catastrophes » du mathématicien René Thom. La pensée économique n’est pas restée à l’écart de ce mouvement. Des auteurs se sont attachés – et s’attachent – à la faire progresser, tel Joseph Schumpeter (1883-1950) qui a développé le concept de « destruction créatrice » du capitalisme qui détruit ses éléments vieillis en en créant continuellement de nouveaux. On voit le parallèle avec un univers qui se dégrade en engendrant un monde de plus en plus complexe. Ces travaux n’ont pas encore débouché sur une nouvelle synthèse.

La conclusion est forte : il ne faut jamais juger les auteurs en dehors de leur époque. Ricardo, qui vivait au XlXème siècle en Angleterre, au début du capitalisme, eut raison d’insister sur la vertu de l’épargne : ce qui manquait alors, c’était le capital, moteur du développement. En revanche, un peu plus d’un siècle plus tard, Keynes eut tout aussi raison de préconiser l’inverse, c’est-à-dire de dépenser. L’accumulation primitive du capital étant réalisée, la consommation était devenue le moteur de l’économie. L’essentiel est donc de ne pas se tromper d’époque. Et c’est ce que font aujourd’hui les néolibéraux.

Lucienne Gouguenheim




Economie : quatre interrogations…

Écrit par Les Réseaux du Parvis
Dimanche, 11 Mars 2012 16:46
Economie et écologie

Quatre constats suscitent quatre interrogations fondamentales :

1. L’économie capitaliste qui gouverne le monde moderne est de plus en plus contaminée par la spéculation financière, qui a précipité la plupart des États dans une crise aux conséquences sociales dramatiques.

Peut-on moraliser et réorienter le capitalisme, ou doit-on le considérer comme intrinsèquement pervers ?

2. Le mythe de la croissance illimitée sur lequel repose l’économie moderne engendre une pression insoutenable sur les ressources de la planète et des dégradations et pollutions de plus en plus graves.

Comment gérer la contradiction entre la poursuite ou la relance de la croissance, présentées comme le remède à la crise, et l’impérieuse nécessité de sauvegarder pour les générations futures les biens communs que sont l’eau, l’air, les sols, la biodiversité, les matières premières… ?

3. En réaction aux graves désordres dus à la surexploitation de la planète, à la frénésie de la consommation et aux inégalités sociales croissantes, la conscience écologique, qui progresse dans l’opinion, nous invite à une profonde reconversion. Sommes-nous réellement prêts à transformer nos mentalités et comportements en vue d’une nouvelle forme de civilisation alliant sobriété et justice ?

4. Les principes qui fondent le capitalisme et, plus encore, les graves déséquilibres sociaux et écologiques qu’engendrent l’économie libérale et ses dérives sont un défi pour le christianisme. Comment les valeurs évangéliques de solidarité, paix, attention aux plus faibles, frugalité… peuvent-elles rejoindre et sous-tendre la conscience écologique ?

1/ Sur le premier thème, une réaction commune : non, on ne peut pas vraiment moraliser le capitalisme et lui faire confiance pour construire l’avenir. Ce capitalisme prédateur, qui « nous conduit dans le mur » et « se mord la queue », va-t-il imploser de lui-même ? Il faut promouvoir des solutions alternatives, à commencer par des mesures comme le RMA (revenu maximal admissible ou autorisé) visant à empêcher les profits indécents d’une minorité et, plus généralement, par l’établissement d’une gouvernance mondiale. Mais un véritable changement de cap ne peut être obtenu qu’en remplaçant l’esprit de compétition par la coopération, ce qui implique le développement de l’ « économie sociale et solidaire » sous toutes ses formes et d’expériences échappant aux circuits monétaires, comme les SEL : systèmes d’échanges locaux de services ou compétences.

2/ Sur le deuxième thème : difficultés d’un compromis entre la croissance et une économie de la sobriété. On ne peut pas revenir à l’autarcie domestique de jadis, mais la notion en vogue de « développement durable » est pleine d’ambiguïté. La « croissance indéfinie dans un monde fini » n’est plus possible. Les excès et gaspillages de notre société de consommation sont pointés du doigt.

La question de la production agricole est au coeur de ces contradictions. Comment faire face aux besoins croissants de la population mondiale, qui dépassera sans doute les 9 milliards d’habitants en 2050 ? Les agriculteurs français, encadrés aujourd’hui par la « politique agricole commune » et par la FNSEA , sont prisonniers du système, notamment par le biais des remboursements, et ne sont ni encouragés, ni aidés à se reconvertir dans l’agriculture biologique. À l’échelle mondiale,

l’exportation à bas prix des surplus alimentaires des pays développés ruine la petite agriculture paysanne en Afrique, où pourtant il serait urgent de promouvoir la souveraineté alimentaire des populations.

L’indispensable défense de l’emploi passe par des initiatives allant à l’encontre des exigences éthiques ou écologiques. À Saint-Etienne, par exemple, les salariés de l’industrie d’armement se sont légitimement battus pour ne pas être réduits au chômage. Pour des raisons électoralistes, les hommes politiques hésitent à dénoncer les dangers qui menacent la planète et à agir en faveur de l’environnement. Il est clair cependant que la course à la croissance, en aggravant sans cesse les pressions sur les ressources communes et les inégalités sociales, est un ferment de violence.

Le grand choc prévisible viendra-t-il de désordres écologiques irréparables ou de la révolte des pauvres ?

L’espoir réside peut-être dans la large prise de conscience des périls chez les jeunes. L’école doit favoriser l’esprit d’équipe, la solidarité, l’éveil à la beauté Cette question des relations entre Évangile et écologie soulève au préalable le problème du rôle du christianisme et plus particulièrement des Églises chrétiennes par rapport au capitalisme. La pensée judéo-chrétienne a manifestement favorisé l’esprit d’entreprise et l’émergence de l’économie capitaliste. Il semble toutefois que la recommandation de Dieu dans la Genèse : « Emplissez la terre et soumettez-la » puisse être interprétée dans le sens de prendre soin de la création, plutôt que d’exercer une domination sur la nature.

Il serait intéressant de considérer le point de vue des autres religions sur cette question des relations entre économie, écologie et spiritualité, et de collaborer à une position commune. En tout cas, l’Église catholique n’a pas fait preuve jusqu’à présent de beaucoup de hardiesse dans la dénonciation des excès du capitalisme et des pressions sur l’environnement. Un texte récent de la Conférence des évêques de France (La création au risque de l’environnement) apparaît bien timide à cet égard. Les protestants ont réagi plus vite et avec plus de conviction. En fait, on attend des paroles fortes et sans ambiguïté de la part du magistère catholique, mais elles ne viendront sans doute pas sans une incitation vigoureuse du peuple chrétien de base.

Mise à jour le Dimanche, 29 Avril 2012 17:56




Economie et Ecologie

Écrit par Les Réseaux du Parvis
Samedi, 10 Mars 2012 09:29
« Économie et écologie : nos responsabilités »
Cet article est extrait de la présentation de l’atelier que l’auteur a animé lors du rassemblement de Lyon.Nos responsabilités en la matière vont dépendre des réponses que nous pourronsapporter à un certain nombre de questions regroupées en quatre thèmes :
1. L’économie capitaliste, fondée sur l’esprit d’entreprise, la recherche du profit, la primauté de l’argent, la concurrence…, développée d’abord en Occident, s’est peu à peu étendue au monde entier (phénomène de la « mondialisation »). Elle s’est moulée de plus en plus dans le libéralisme, qui privilégie l’initiative individuelle face aux contraintes publiques (« l’État est le problème »), la suprématie du marché, la compétition effrénée. Plus récemment, elle a subi de graves dérives en raison de la place qu’a prise la spéculation financière, quasiment déconnectée de l’économie réelle, au point de susciter la grave crise que nous connaissons aujourd’hui et qui accentue de façon intolérable les inégalités et exclusions inhérentes au système
Question. Pour sortir de la crise, peut-on faire confiance encore au capitalisme ? Est-il suffisant de lui imposer des règles, des garde-fous, de le « moraliser » et est-ce possible ? Ou faut-il abattre le capitalisme (jugé intrinsèquement pervers) pour construire un autre type d’économie et de civilisation ?
2. S’appuyant de manière indissociable sur les notions de croissance illimitée, de domination, d’exploitation des ressources naturelles, le système économique dominant, conjointement à la pression démographique grandissante, constitue aujourd’hui une menace majeure pour l’état de la planète et son avenir, en raison de l’épuisement des sources d’énergie et matières minérales fossiles, de la dégradation des sols et des écosystèmes en général, de lapollution de l’air, des eaux, des océans, des atteintes à la biodiversité… Les signes alarmants, tels que le réchauffement climatique, se multiplient. D’où le succès actuel de la notion pourtant très ambiguë de « développement durable ».
Question. Pour sortir de la crise, lutter contre le chômage, créer des emplois, on nous dit qu’il faut absolument relancer la croissance : est-ce compatible avec l’impérieuse nécessité de réduire les pressions de plus en plus vives qui mettent notre planète et l’humanité elle-même en grand péril (cf. l’éditorial du hors série « Les chiffres de 2011 » d’Alternatives économiques : « Schizophrénie ? ») ? Une croissance douce, écologique reposant sur les « emplois verts », les énergies renouvelables… peut-elle permettre de concilier ces deux exigences ?
3. Face aux menaces et dégradations qui affectent la planète et aussi face aux inégalités sociales criantes et à l’instabilité politique qui caractérisent le monde moderne, une large prise de conscience se développe et s’exprime, entre autres, par la montée en puissance de la conscience écologique et de l’écologie politique. Certains lobbies dénoncent le catastrophisme ambiant, fustigent l’apologie de la décroissance ou le risque de la frugalité imposée de force. Il n’empêche que la nécessité de promouvoir un nouveau mode de vie gagne du terrain, fondé sur la remise en cause de la société de consommation et du matraquage publicitaire, sur la sobriété (cf. la « sobriété heureuse » de Pierre Rabhi), la lutte contre le gaspillage, la responsabilité citoyenne en matière d’ « empreinte écologique », conjointement à la réhabilitation de valeurs non marchandes : culture, loisirs, convivialité, amitié, amour, paix…
Question. Prisonniers que nous sommes de notre civilisation de la consommation, des transports motorisés, des biens jetables… sommes-nous réellement prêts à changer nos mentalités et comportements, à envisager pour nous-mêmes et l’humanité entière une autre forme de civilisation (cf. Hervé Kempf : « Pour sauver la planète, sortez du capitalisme ») ? De quelles manières individuelles et collectives ? Par quelles étapes ?
4. La conscience chrétienne est directement interpellée par les principes fondamentaux du capitalisme et plus encore par les dérives spéculatives et profondément immorales du libéralisme triomphant. Elle l’est aussi par la surexploitation et le pillage du patrimoine commun de l’humanité que sont les ressources de la planète, comme par la compétition sans merci dont elles font l’objet, au risque d’une aggravation explosive des inégalités et des frustrations.
Question. Comment les valeurs évangéliques, ou simplement humanistes, peuvent-elles nous aider à bâtir une économie vouée au service de l’homme ? Comment peuvent-elles sous-tendrela conscience écologique dans sa double dimension du soin à apporter à l’environnement (à la « création ») et de l’action pour la justice, le partage des biens, la solidarité, la paix ?

Jean-Bernard Suchel

Croyants en liberté Saint-Etienne

Mise à jour le Dimanche, 29 Avril 2012 17:57




Vers un changement de cap… Vers une économie plurielle

Écrit par Les Réseaux du Parvis
Vendredi, 01 Janvier 2010 18:14
Que voulons-nous vivre en 2011 ?  Vers un changement de cap.

– Pouvons-nous aller vers une économie plurielle en construisant une économie sociale et solidaire, en diminuant progressivement le domaine économique qui fonctionne sur le seul profit.

– Pouvons-nous rechercher une évolution dans tous les domaines : la revitalisation des notions capitales de solidarité, de justice et aussi un ensemble d’évolutions dans un contexte de désintégration des solidarités traditionnelles.

– Expérimentons des industries coopératives, des entreprises citoyennes, le commerce équitable pour rechercher des régulations et limiter l’impératif du profit.

– Suscitons  des résistances aux intoxications consuméristes.

Pour cela cherchons à :

– Promouvoir l’alimentation de saison et de proximité qui favorise l’agriculture maraîchère et fermière.

Cherchons à substituer au règne du jetable celui des objets durables et des métiers de réparation, à favoriser le besoin d’objets artisanaux plutôt que des objets industriels.

– Il s’agit de prendre conscience que les relations de proximité, la valorisation des savoir-faire, la vie d’une cité, de quartiers, toute cette vie de proximité est plus importante que l’argent. C’est retrouver la part de dignité la responsabilité pour permettre l’épanouissement des relations humaines. Remplacer l’hégémonie, la suprématie de la quantité par celle de la qualité.

– L’Economie sociale doit être accompagnée de mesures politiques pour lutter contre les misères croissantes en favorisant les métiers de solidarité, de convivialité et en suscitant de grands travaux qui permettent de sauvegarder la planète.

– L’Economie sociale doit se développer dans la perspective d’une grande politique d’humanisation des villes et de revitalisation des campagnes.

– L’Economie de profit développe des fonctionnements inhumains. La misère matérielle, loin de disparaître, s’accroît. L’économie de profit entraîne un fonctionnement inhumain en voulant tout rationnaliser, rentabiliser, hyperspécialiser, chronométrer, c’est-à-dire déshumaniser                                     le travail. Les impératifs managériaux et gestionnaires produisent de plus en plus de souffrances dont témoignent les suicides dans les entreprises managérisées.

– La logique d’efficacité, de prédictibilité, de calculabilité hyperspécialisée et chronométrée gangrène aujourd’hui toutes les activités humaines, y compris l’administration, les services publics, la santé. La mécanisation prend les commandes du monde urbain et même du monde rural, avec l’agriculture et l’élevage industrialisés. Elle envahit la vie quotidienne, l’éducation, la consommation, les loisirs, les services…

– Pour changer de cap, il faut associer mondialisation et démondialisation (par le retour aux économies de proximité) croissances et décroissances, développement et enveloppement (par le retour vers nos plus profondes nécessités intérieures).

– Mondialisation, occidentalisation, développement sont les trois faces d’un dynamisme incontrôlé. Le développement techno-économique s’est appliqué sur tous les continents sans tenir compte des singularités propres à chaque nation en valorisant les savoirs, savoir-faire, les arts de vie, les valeurs des multiples cultures.

La science, la technique, l’économie, le profit sont les moteurs de ce dynamisme qui comporte ce que les anciens Grecs appelaient l’ubris – la démesure. Dans cette course effrénée, de nouveaux périls pour toute l’humanité sont apparus avec la prolifération des armes nucléaires, la dégradation de la biosphère, des conflits de mille fanatismes et aveuglements etc.

La crise économique actuelle, que Keynes aurait appelé ” crise de l’économie ” c’est-à-dire crise du système fondé sur les lois du seul marché, s’inscrit dans un ensemble de crises. Crise de la relation entre les humains et la nature, dont témoignent les multiples dégradations de la biosphère, dont le réchauffement climatique. Crise des sociétés traditionnelles qui tendent à se désintégrer sous le dynamisme de l’occidentalisation ou à se refermer avec hostilité. Crise de la  modernité elle-même, qui, dans les pays occidentaux n’a pas réalisé les promesses d’une vie meilleure et harmonieuse, mais crée un nouveau mal-être, malgré l’idée formulée par Condorcet et devenue un dogme universel jusqu’à la fin du XXiéme siècle, que le progrès est une loi irréductible de l’histoire humaine. L’ensemble de toutes ces crises constitue la crise de l’humanité qui n’arrive pas à devenir humanité.

Ainsi le développement de l’économie sociale et solidaire s’inscrira dans une perspective incluant toute l’humanité. Ce qui n’empêche nullement de commencer dans un cadre national.  La voie de l’économie sociale et solidaire peut et doit confluer avec d’autres voies réformatrices pour développer et sauvegarder les richesses de la planète et les valeurs humaines de justice, de solidarité, de partage pour un mieux-être de tous.

Réflexions à partir du livre d’Edgar Morin : « Ma Gauche » Bourin éditeur, 2010.

 

 

 

 

 

 

 




Economie : crise et métamorphose…

Écrit par Maurice Elain
Mardi, 30 Décembre 2008 19:12

Crise et métamorphose…

Tout est à transformer pour créer de nouvelles raisons d’espérer.

Quand un système est incapable de traiter ses problèmes vitaux il se dégrade, se désintègre ou il se transforme, se métamorphose. Le système terre est incapable de s’organiser pour traiter ses problèmes vitaux : la dégradation de la biosphère, le péril nucléaire, l’économie mondiale sans vraie régulation, le retour des famines, les conflits ethno-politico-religieux se développent dans de nombreux pays.

Le probable est la désintégration, l’improbable mais possible est la métamorphose. La métamorphose telle la chenille qui devient papillon passe par un processus à la fois d’autodestruction et d’autoreconstruction.

Des sociétés historiques au Moyen-Orient, en Inde, en Chine, au Mexique, au Pérou… ont réussi une métamorphose en partant de sociétés archaïques vers des sociétés développées : les sociétés historiquement construites disposent d’armes d’anéantissement qui peuvent entraîner la destruction de l’humanité. Les capacités créatrices de l’évolution humaine semblent épuisées avec la démocratie représentative et l’économie libérale.

L’idée de métamorphose est plus riche que l’idée de révolution, elle est transformatrice et dans la continuité et la conservation de la vie, de l’héritage des cultures.

Pour aller vers la métamorphose comment changer de direction. Est-il possible de freiner le déferlement techno-scientifico-économico-civilisationnel qui conduit la planète au désastre. L’histoire humaine a souvent changé de voie. Tout commence toujours par une innovation, un nouveau message marginal, modeste, souvent invisible aux contemporains. Ainsi ont commencé les grandes religions : Bouddhisme, Christianisme, Islam … Le capitalisme s’est développé avec la société industrielle en désintégrant les royautés.

La science moderne s’est développée à partir de quelques esprits déviants : Galilée, Descartes… Le socialisme est né de quelques esprits autodidactes… Aujourd’hui tout est à repenser. Tout est à recommencer. Tout recommence sans qu’on le sache. Il existe sur tous les continents un bouillonnement créatif, une multitude d’initiatives locales dans le sens de la régénération économique, sociale, politique, cognitive, éthique … Il existe une pluralité de chemins réformateurs.

Il faut à la fois mondialiser et démondialiser, croître et décroître, développer et envelopper.

Mondialiser et démondialiser c’est multiplier les processus de communication tout en gardant une appartenance à une Terre-Patrie, promouvoir de façon démondialisée l’alimentation de proximité, les artisanats de proximité, des commerces, des services de proximité, des communautés locales et régionales.

Croître et décroître signifie qu’il faut augmenter les services, les énergies vertes, les transports publics, l’économie plurielle dont l’économie sociale et solidaire, les aménagements d’humanisation des mégapoles les agriculteurs biologiques en décroissant les intoxications, les pesticides, la nourriture industrialisée la production d’objets jetables, non réparables, le trafic automobile, le trafic camion.

Développer et envelopper signifie que l’objectif n’est plus fondamentalement le développement des biens matériels, de la rentabilité, du calculable mais aussi le retour de chacun sur ses besoins intérieurs, sa vie intérieure, le lien avec autrui, la fraternité, l’amitié…

Il ne suffit pas de dénoncer, il faut maintenant construire les raisons d’espérer ?

L’improbable peut surgir, l’inattendu peut arriver car la résistance s’organise et la créativité est à l’oeuvre. De même qu’il existe dans tout organisme humain des cellules souches dotées d’aptitudes polyvalentes de même il existe en tout être humain, en toute société humaine des possibilités génératrices, régénératrices. “Là ou croît le péril croît aussi ce qui sauve”, la chance suprême est inséparable du risque suprême.

L’aspiration multimillénaire de l’humanité à l’harmonie (paradis, utopie, idéologie, aspirations, révoltes, résistances…), ces aspirations renaissent dans le grouillement des initiatives multiples qui pourront nourrir des voies réformatrices.

Aujourd’hui la cause est sublime : il s’agit de sauver l’humanité. C’est une espérance en un monde meilleur.

L’origine est devant nous, disait Heidegger, la métamorphose peut être une nouvelle création.

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Nous sommes en période de crise : crise financière, économique, énergétique, alimentaire, climatique, écologique… Comment, dans ce contexte, faire preuve d’intelligence et pas seulement de pouvoir et de puissance. Toutes ces crises se croisent, s’alimentent et dévoilent une crise systémique.

Image Exemple

  1. Comment, à cette occasion, remettre l’humain au centre des préoccupations ? L’argent est là puisqu’il peut être mobilisé du jour au lendemain par milliards d’euros pour sauver un système économique. Cet argent peut être dépensé sans réelle utilité sociale, et pourtant un milliard de personnes vivent avec moins d’un dollar par jour et la moitié de l’humanité avec moins de deux milliards. Un monde qui cautionne et valide un sous-développement durable, c’est une situation intenable sur une planète connectée où tout se voit et tout se sait. Il n’y a pas de « porte-voix » au G.20 pur un milliard d’affamés.

2- Comment tisser la trame d’un monde nouveau où l’on replace l’économie et la finance au service de l’homme ? Il est temps de jeter les bases d’un modèle de développement compatible avec la réalité physique et humaine de notre planète. Nous sommes conditionnés par un unique modèle de développement.

3- Comment mettre fin à une société fondée sur la compétition, la prédation et l’accumulation. Peut-on passer du libre-échange au juste échange ?
La création de nouveaux besoins chaque jour n’est qu’un piège, c’est une croissance qui n’a d’objectif qu’elle-même.

Il faudra changer de modèle, trier dans les possibles, limiter volontairement les besoins, ne pas vouloir tout tout de suite et toujours plus. La civilisation ne consiste pas à multiplier les besoins mais à les limiter volontairement, s’aliéner ou se libérer. « Notre exigence dépasse de 25% les facultés de régénération » nous dit Nicolas Hulot. Il est temps de réconcilier nos actions et nos intentions pour permettre l’épanouissement durable et équitable de la condition humaine. Devenir humain, c’est l’avenir de l’homme.

Mise à jour le Vendredi, 20 Avril 2012 08:59